Hier, le gouvernement Couillard est intervenu devant la Cour suprême du Canada dans un cas concernant l’accès aux écoles françaises au Canada.
Ce cas concerne les francophones du Yukon qui attaquent leur gouvernement parce qu’il refuse de fournir davantage de ressources pour accueillir plus d’élèves dans leurs écoles. Le gouvernement du Yukon demeure attaché au principe interdisant à tout enfant dont l’un des deux parents n’a pas été à l’école dans la langue de la minorité, de même que pour les enfants des nouveaux arrivants, de fréquenter une école francophone sur son territoire. Le Yukon adopte ainsi une position s’inspirant très fortement de la loi 101 qui impose des clauses similaires aux parents désireux d’envoyer leurs enfants dans une école anglaise, au Québec.
Si on se limite à une analyse du premier degré, on pourrait dire que ce qui est bon pour minou devrait aussi être bon pour pitou. Et que le Yukon a donc parfaitement raison d’agir comme il le fait, en restreignant l’accès à l’école francophone, comme le Québec le fait pour l’école anglaise.
Or, cela serait faire fausse route. Car le Canada, cette maison de fous, ne peut se comprendre sans le réfléchir en termes d’assimilation.
Il faut tout d’abord souligner que l’anglais n’est pas dans une situation similaire en Amérique que le français. Le pouvoir d’attraction, et donc d’assimilation, c’est cette première langue qui en bénéficie ici. Tant au Québec, où elle est minoritaire, qu’au Yukon, où elle est majoritaire. La gestion linguistique ne peut donc se penser qu’en fonction d’une asymétrie bienveillante pour la langue la plus fragile des deux.
Historiquement, le Canada a tout fait pour ratatiner le français sur son territoire. En favorisant une immigration anglophone, en interdisant les écoles françaises ou en abattant les Métis du Manitoba. Ces pratiques ont été en bonne partie efficaces. Et on se retrouve aujourd’hui face à un univers francophone hors Québec réduit comme peau de chagrin. Mon camarade Pierre-Luc Bégin et Paul Bénéteau ont très bien démontré dans un livre, et ce, à partir des informations contenues dans les derniers recensements, que l’assimilation des francophones hors Québec est à peu près complétée dans plusieurs provinces au moment où on se parle. Et que les communautés francophones qui résistent le mieux sont quand même condamnées dans le temps. (http://www.lequebecois.org/boutique/le-genocide-culturel-des-francophones-au-canada/)
Il est par conséquent évident que toute mesure favorisant le redressement de la situation de la francophonie au Canada ne peut être que la bienvenue. Et il est tout aussi évident qu’il faut conserver des mesures assurant la pérennité du français au Québec, là où il est également menacé, même si moins violemment que dans les provinces du Canada. Ce qui signifie qu’il faut ici restreindre les droits de la minorité.
Et c’est là que le bât blesse. Car si la Cour suprême devait donner raison aux francophones du Yukon, c’est une porte qui s’ouvrirait sur un assouplissement de toutes les règles régissant l’accès aux écoles fonctionnant dans les langues des minorités. Parce que la constitution est la même pour tous, même si le Québec ne l’a jamais signée. Sans l’ombre d’un doute, ce jugement pourrait servir les Brent Tyler de ce monde qui chargeraient avec une vigueur renouvelée la loi 101.
Pour sa propre protection, le Québec ne peut évidemment pas appuyer une telle cause. Même si nous souhaitons le meilleur aux francophones du Canada même si on voudrait les voir enfin s’épanouir sur ces terres inhospitalières grâce à une attitude positive du gouvernement du Yukon à leur égard. Tout comme le ministre de la Marine Nicolas-René Berryer a répondu à Bougainville lorsqu’il s’est rendu en France en 1758 afin de recruter des renforts pour la défense de la Nouvelle-France: « lorsque le feu est à la maison, on ne sauve pas les écuries ». Il s’agit là d’une formule dure, impitoyable, mais d’une logique implacable, une formule qui était cohérente dans la France de 1758 et qu’il l’est tout autant dans ce Canada de 2015.
Parce que nous sommes dans une maison de fous, nous devons protéger le français au Québec en nous rangeant du côté des assimilateurs de francophones du Canada! Position inconfortable s’il en est une.
Ce qui est étonnant dans ce dossier, c’est de voir les libéraux adopter une position qui s’évertue à protéger les acquis de la loi 101 au détriment des francophones du Yukon. Considérant que ce parti a ouvert la porte à l’enseignement intensif de l’anglais au primaire, qu’il a initié l’enseignement de cette langue dès la première année, qu’il a ouvert une brèche dans la loi 101 avec la loi 115 qui permet aux parents allophones et francophones fortunés d’utiliser l’école privée afin d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise, qu’il a coupé dans les services de francisation des immigrants, et j’en passe, il n’aurait été en rien surprenant de le voir se ranger du côté des francophones du Yukon; une façon comme une autre, pour lui, de passer la puck aux opposants à la loi 101, sans porter l’odieux de cette nouvelle charge décisive contre le français au Québec.
À l’évidence, il y a quelque chose que je ne saisis pas. Ou que les libéraux n’ont pas compris…
http://cause.bell.ca/fr/nos-initiatives/fonds-communautaires/comment-appliquer/
C’est pour la même raison que je suis tenté de voter pour Justin aux prochaines fédéral. J’me dis qui peut pas avoir meilleur baveux et que malheureusement les québecois réagissent plutôt qu’ils agissent…Je blague, mais c’est un peu la même logique dans l’article, non?
Ben l’article parle de l’attitude d’un gouvernement du Québec pogné dans la fédération canadienne. Alors que la solution ultime pour le Québec, bien évidemment, c’est l’indépendance. Une façon d’agir au lieu de réagir.
Comme francophone minoritaire en C.-B. j’appuie fortement la position du Québec. Ayant oeuvré au niveau des parents francophones durant les premiers balbutiement du programme scolaire francophone ici, je réaffirme que nous devons appliquer l’article 23 de la charte cannadienne, sans équivoque. C’est déjà assez difficile de sauvegarder le français chez nos enfants et, dans mon cas, mes petits-enfants, nous ne pouvons diluer l’atmosphère dans lequel ils apprennent. A Victoria, l’école francophone, de la maternelle à la 12ieme année, accueille plus de 500 enfants et offre les programmes du Baccalaureat International. En s’assurant d’une éducation de qualité, l’école Brodeur n’a aucun problème de recrutement. Il est sûr que les débuts n’ont pas été faciles: 24 enfants de la 1ère à la 7ième dans une classe dans une école anglaise, avec un seul prof au début des années 80 jusqu’à maintenant, les progrès sont immenses grâce aux parents qui n’ont jamais lâché.