Jacques Parizeau : l’audace en héritage

Le cerveau embrumé par la fatigue et la peine, je ne sais pas si je trouverai les mots pour rendre hommage à Monsieur Parizeau. Mais je ne peux passer sous silence son départ. Pour mes camarades du Québécois et moi, Jacques Parizeau aura été depuis le début de notre militantisme une inspiration et un mentor. Alors qu’il vient de nous quitter, quoi retenir de lui? Ses réalisations sont tellement nombreuses… Personnellement, je retiendrai d’abord et avant tout son attitude. Celle d’un gagnant. Dans un Québec colonisé à l’os, Monsieur était tout le contraire du colonisé. C’était peut-être d’abord ça, Jacques Parizeau. Un homme libre.

Je ne reviendrai donc pas sur tout ce qu’a fait Monsieur Parizeau pour le Québec et le mouvement indépendantiste. D’autres l’expliqueront mieux que moi. D’ailleurs, pour tout Québécois qui prétend connaître l’histoire du Québec, il faut avoir lu la biographie en trois tomes que Pierre Duchesne a consacrée à Monsieur. C’est magistral. Quelle vie! Quel homme! Et on y voit bien comment Jacques Parizeau a dû se dresser toute sa vie contre les hésitants, les peureux, les nés-pour-un-petit-pain, les pas-de-colonne…

Monsieur, lui, avait quelque chose que bien peu de Québécois ont, à tout le moins au plan politique… La confiance! L’audace! Ça le rendait peut-être moins populaire qu’un Lévesque avec sa peur et ses doutes, mais je persiste à croire que l’audace de Monsieur aura rejailli sur nous, nous aura tous rendus plus confiants, moins colonisés, plus libres. Et c’est pour cela que Jacques Parizeau aura été le leader indépendantiste le plus craint et le plus détesté par ses ennemis. Avec lui, ils savaient qu’ils avaient devant eux un gagnant, un courageux, un homme de sacrifice, prêt à faire ce qu’il faut pour l’emporter. Un homme d’exception. Et un homme d’État. Parizeau avait compris que la politique n’est pas l’art du possible comme le disent les colonisés, mais bien de travailler à rendre les choses que l’on veut possibles.

Je suis convaincu que si Monsieur Parizeau était né dans une grande puissance, il aurait marqué l’histoire du monde au même titre que les De Gaulle ou Churchill. Il était de la trempe des grands personnages historiques. J’espère au moins que le Québec en général et le mouvement indépendantiste en particulier sauront se souvenir de lui et lui rendront la place qu’il mérite dans notre histoire. J’espère aussi que nous prendrons son audace en héritage.

Quant à moi, je me souviendrai de cet homme d’audace et du généreux mentor qui, au début de l’aventure du journal Le Québécois, n’a pas hésité à collaborer avec nous (qui avons eu l’immense honneur de l’avoir pour chroniqueur) et à nous donner conseils et encouragements.

Et, Monsieur Parizeau, au jour de l’indépendance, qui viendra peut-être plus vite qu’on le pense, j’espère que nous aurons tous une pensée pour vous. Le mouvement indépendantiste aurait pu s’effondrer définitivement dans les années 1980. Mais vous avez refusé qu’il en soit ainsi. Vous avez refusé le défaitisme.

Merci pour vos refus. Merci pour votre audace. Merci pour vos réalisations. Merci pour tout.

« Si vous êtes élu avec un programme, vous le réalisez. Les sondages annoncent une défaite, on se frappe à un mur… eh bien, on va le faire tomber le mur! »
– Jacques Parizeau

Pierre-Luc Bégin

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