Le boss saoudien de Philippe Couillard

Philippe Couillard l’admet lui-même. Il a fait plusieurs erreurs de parcours par le passé. Son engagement ferme envers l’Arabie saoudite, une monarchie bafouant allègrement les droits de la personnes, un régime qui applique la charia à la lettre, là où les femmes sont des moins que rien et où l’homosexualité vous condamne à la potence, demeure très certainement sa plus notable d’entre toutes.

On en sait fort peu sur ce qui a amené l’actuel chef des libéraux en Arabie saoudite. Encore moins sur ce qu’il y a fait. On sait seulement qu’il s’est enrichi grâce à ce pays, qu’il a contribué, de 1992 à 1996, à la fondation du département de neurochirurgie de l’hôpital de Darhan appartenant à la pétrolière Aramco, et qu’il a été conseiller du ministre de la Santé saoudien, Abdullah bin Abdulaziz Al Rabiah, durant quelques années, et ce, à partir de 2009.

Mais qui au juste est ce mystérieux Abdullah bin Abdulaziz Al Rabiah ?

Il est toujours difficile de dénicher des informations sur les dirigeants d’une dictature. Al Rabiah (vous me permettrez de l’appeler ainsi) ne fait pas exception à la règle. L’on sait toutefois qu’il appartient à la famille royale. Il est né à Riyad en 1954. C’est un médecin-chirurgien qui a fait ses études, en partie, en Alberta et en Nouvelle-Écosse (mais aussi à l’Université du roi Saoud et à l’Université Ling Khalid). Il s’est plus particulièrement fait connaître pour son expertise dans la séparation des bébés siamois. En 2009, Al Rabiah a été nommé ministre de la Santé du royaume saoudien. Il n’a fait ni une ni deux et a dès lors demandé à Philippe Couillard, un ami du royaume, d’agir à titre de conseiller spécial auprès de sa personne. Offre que Couillard s’est empressé d’accepter.

Il est vrai que Couillard avait conservé d’excellents contacts avec l’Arabie saoudite, habitée par un peuple qu’il dit toujours admirer. Lors de son passage au sein de l’Aramco de 1992 à 1996, il avait tissé un réseau de relations avec des gens provenant de toutes sortes d’horizons. On peut comprendre qu’un dirigeant de la dictature saoudienne ait voulu bénéficier, lui aussi, des conseils du bon docteur Couillard…

À propos de l’Aramco, plus importante compagnie de pétrole au monde, il faut savoir que ses installations de Darhan ne sont rien d’autre qu’un ghetto opulent situé à l’intérieur même de l’Arabie saoudite ultra conservatrice. Les libertés interdites par la famille royale dans le reste du pays y sont hypocritement autorisées aux Américains, aux Canadiens et autres profiteurs de tout acabit qui s’y enrichissent grâce au pétrole, et ce, parce qu’elles sont appliquées derrière des barricades, bien à l’abri des regards du petit peuple qui, lui, se fait tabasser par la police saoudienne s’il ne respecte pas la violente charia.

Les entrées de Couillard dans ce coin du monde étaient si importantes et si rentables que lorsqu’il accéda au conseil d’administration de la minière Canadian Royalties, en 2009, aux côtés, encore une fois, de son bon ami Arthur Porter, le président de la compagnie, Glenn J. Mullan, affirma vouloir profiter des contacts privilégiés des deux hommes au Moyen-Orient et au Sierre Leone pour trouver 350 millions$ devant servir au financement des opérations de la mine. Démontrant de ce fait à quel point les accointances de Couillard en Arabie saoudite étaient recherchées.

En Arabie saoudite, la charia s’applique à tous et partout (à part dans l’enceinte barricadée de l’Aramco, il est vrai). Le National post a donc demandé à Philippe Couillard s’il s’était senti à l’aise de conseiller un ministre saoudien de la Santé qui laissait ses hôpitaux punir les gens pour un méfait ou un autre, punition qui pouvait impliquer de leur sectionner la moelle épinière, par exemple. Couillard a refusé de répondre à la question. On peut le comprendre…

Al Rabiah a été congédié du ministère de la Santé en avril 2014, pour des raisons indéterminées, alors que la crise du SRAS frappait le royaume. Il a alors été nommé à titre de conseiller à la cour royale, là où il contribue depuis à l’application de l’inique charia, la loi islamique.

Avant d’agir à titre de ministre de la Santé, Al Rabiah était l’un des directeurs de la Garde nationale d’Arabie saoudite; il était principalement responsable des affaires sanitaires. Il a occupé ces fonctions de 2003 à 2009. La Garde nationale regroupe les soldats d’élite du royaume. Leur mandat étant de protéger la famille royale et de réprimer, dans la violence, toute dissidence politique. En 2011, c’est ce corps d’élite qui a été envoyé en renfort au Barheïn, régime totalitaire et tout aussi répressif que ne l’est l’Arabie saoudite, afin d’y mâter les manifestations liées au printemps arabe.

Dès 1975, la Garde nationale a été entraînée par Vinnel Corporation, une compagnie privée américaine. Des vétérans de la guerre du Vietnam ont enseigné aux soldats d’élite du royaume comment combattre les insurrections. Dès les années 1990, la faiblesse des équipements militaires de la Garde a été constatée. L’Arabie saoudite a réglé le problème en achetant des armes auprès, entre autres, du Canada et des États-Unis (Ce qui contribue toujours à faire taire bien des critiques).

La Garde nationale n’est pas seulement engagée dans les opérations contre-insurrectionnelles. Elle a aussi le mandat de protéger les oléoducs du pays et la compagnie Aramco pour laquelle Philippe Couillard a travaillé dans les années 1990. Ce sont les étrangers vivant comme des pachas derrière les remparts de l’Aramco, permission en main du roi pour le faire en autant que les misères du peuple vivant de l’autre côté soient ignorées par ceux-là, qui doivent se sentir rassurés de jouir d’une telle protection!

En 2014, la compagnie canadienne General Dynamics a signé un contrat d’environ 10 milliards de dollars avec l’Arabie saoudite, contrat facilité par le gouvernement canadien de Stephen Harper. Ce contrat prévoit la livraison de chars d’assaut légers (entre autres pour la garde nationale qui les utilisera pour toutes sortes de manoeuvres plus inquiétantes les unes que les autres), des mesures de formation militaire et de services de soutien. Ce contrat constitue une violation des règles établies par le ministère canadien des Affaires étrangères et du commerce international, règles qui indiquent « que le Canada contrôle rigoureusement les exportations de matériel et de technologies vers les pays où les droits humains de leurs citoyens font l’objet de violations graves et répétées de la part du gouvernement, à moins qu’il puisse être démontré qu’il n’existe aucun risque raisonnable que les marchandises puissent être utilisées contre la population civile ». Dans le cas de l’Arabie saoudite, un régime totalitaire foulant au pied les droits humains au quotidien, là où on pratique les punitions corporelles, il est amplement démontré que les populations civiles sont directement menacées par de telles armes. Surtout qu’elles sont destinées à la Garde nationale qui n’en est pas à ses premières violations des droits humains.

Qu’on retourne le problème d’un côté ou de l’autre, qu’on découvre un jour ceci ou cela à l’égard des agissements de l’actuel premier ministre du Québec en Arabie saoudite, il n’en demeure pas moins qu’une chose peut être dite dès maintenant. Et c’est qu’il faut être d’une immoralité sans nom pour se mettre au service d’une telle dictature. Une dictature qui tue ses opposants. Qui décapite en public. Qui fouette des femmes pour les punir du viol qu’elles ont subi. Un moment donné, il faut appeler les choses par leur vrai nom. Un type qui s’est enrichi d’argent sale (placé dans un paradis fiscal en plus) auprès d’une dictature coupe-gorge administrée par des tortionnaires qu’il refuse toujours aujourd’hui de condamner est une crapule qui ne devrait jamais diriger un peuple.

Couillard est indigne de la fonction de premier ministre du Québec!

Posted in à la une, chroniques politique québécoise, Journal Le Québécois.

5 commentaires

  1. Merci à toute l’équipe pour le travail formidable que vous accomplissez.
    Je veux féliciter monsieur Bourgeois pour un autre article que j’ai fait parvenir partout, même dans les médias européens.
    Extrait-
    « Qu’on retourne le problème d’un côté ou de l’autre, qu’on découvre un jour ceci ou cela à l’égard des agissements de l’actuel premier ministre du Québec en Arabie saoudite, il n’en demeure pas moins qu’une chose peut être dite dès maintenant. Et c’est qu’il faut être d’une immoralité sans nom pour se mettre au service d’une telle dictature. Une dictature qui tue ses opposants. Qui décapite en public. Qui fouette des femmes pour les punir du viol qu’elles ont subi. Un moment donné, il faut appeler les choses par leur vrai nom. Un type qui s’est enrichi d’argent sale (placé dans un paradis fiscal en plus) auprès d’une dictature coupe-gorge administrée par des tortionnaires qu’il refuse toujours aujourd’hui de condamner est une crapule qui ne devrait jamais diriger un peuple. Couillard est indigne de la fonction de premier ministre du Québec! »
    http://www.lequebecois.org/le-boss-saoudien-de-philippe-couillard/

    Mes salutations
    Lorraine Dubé

Comments are closed.