Mairie de Montréal : quel choix pour les indépendantistes?

Denis Coderre : Elvis Gratton à la mairie

Le « gros Coderre », comme disait Falardeau, est né politiquement au Parti libéral du Canada. En 2008, il a même lorgné la chefferie du parti des commandites. Le parti de Trudeau et de Jean Chrétien. Le parti de la Nuit des longs couteaux et des Mesures de guerre. Le parti de la corruption et du mépris envers le Québec. Le parti du vol du référendum de 1995. Son parti.

Or, comme le Parti libéral du Canada ne s’est jamais relevé d’avoir érigé la corruption et la propagande en système au lendemain du dernier référendum, voilà que Coderre veut aujourd’hui devenir maire de Montréal. Le but d’un arriviste étant de finir par arriver quelque part, il n’y a rien là de bien étonnant. Par contre, ce qui est étonnant et même surréaliste, ce sont les sympathies que ce politicien professionnel plus que douteux semble susciter.

En effet, il a beau avoir été financé par des gens tout à fait non recommandables comme l’a révélé La Presse (voir l’article « Coderre a reçu des dons d’origine douteuse »), tout le monde regarde ailleurs ou ne voit que son air jovial. Il a beau faire partie depuis longtemps du parti des commandites et y avoir occupé des postes de responsabilité, tout le monde semble s’en foutre.

Suffit-il au Québec d’avoir des allures de bon vivant, d’être actif sur les réseaux sociaux et d’être capable de pousser une farce plate ou deux dans les talk-shows pour recueillir la faveur du public et même de plusieurs animateurs de télé et autres bien-pensants? J’ose croire que non. Et si c’est le cas, nous sommes, oui, des débiles profonds. C’est probablement d’ailleurs le pari que fait Coderre. J’espère que nous lui donnerons tort.

En tout cas, on ne me fera pas oublier que cet homme a été un membre influent du parti des commandites, du parti du soviétique bill C-20. On ne me fera pas oublier les généreux dons à sa caisse électorale de la part des Lino Zambito, Elio Pagliarulo et autres Gino Lanni.

Ainsi, après Gérald Tremblay, cet ancien ministre libéral dont le règne à Montréal laisse le souvenir de la corruption et de la collusion, vous voulez porter à la tête de notre métropole un autre gros naïf libéral? Surréaliste.

Marcel Côté : le côté de la grosse droite fédéraliste

Il y a aussi Côté, l’ancien de Secor, qui aspire aux plus hautes fonctions montréalaises. Il est moins connu du public. Faisons donc un petit portrait du bonhomme.

Dans le journal Les Affaires, on le présentait ainsi en juin dernier :

« M. Côté est associé fondateur de la société Secor Conseil, vendue à KPMG en 2012. Il a également été conseiller économique du premier ministre Robert Bourassa, de 1986 à 1988, et directeur Planification stratégique et communication du Bureau du premier ministre, Brian Murroney, de 1989 à 1990. […] M. Côté siège au conseil de plusieurs sociétés, dont Empire Company Ltd et la Corporation Minière Osisko. Le 8 mai dernier, M. Côté s’est retiré du conseil du groupe d’assurance Intact Corporation financière, dont il était membre depuis décembre 2004. Auparavant, il a également été président du conseil d’Engenuity Technologies (anciennement Virtual Prototypes), et membre des conseils de Nurun et de Sobeys. »

Ancien très proche conseiller de Bourassa et de Mulroney, déjà, ça donne une idée… En fait, Côté est un ultra fédéraliste et un partisan de la droite sauvage. On lui doit notamment les belles déclarations suivantes, rapportées par Patrick Lagacé dans La Presse (14 juin 2013) :

« En février dernier, commentant l’actualité chez Michel C. Auger à Pas de midi sans info sur les ondes de Radio-Canada, M. Côté a déclaré un truc qu’on imaginerait plus facilement sortir de la bouche de Stéphane Gendron, grand pyromane médiatique: ‘‘La mafia est plus démocratique que les organisations étudiantes.’’

Wow.

Vito Rizzuto, grand démocrate!

Quand Michel l’a invité à nuancer sa pensée, le fondateur de SECOR a persisté dans cette déclaration comique de stupidité: ‘‘Non, c’est vrai…’’

En novembre dernier, j’ai assisté à un colloque des HEC sur ‘‘les grandes tendances stratégiques de 2013’’. M. Côté commentait alors en tant que ‘‘sage’’ les présentations d’experts de tous les milieux, comme le politologue Sami Aoun et l’entrepreneur numérique Éric Chouinard.

Après la présentation de Martin Imbleau, vice-président chez Gaz Métro, M. Côté, grand supporter des gaz de schiste, a lancé ceci:

‘‘Se chauffer à l’électricité, pis subventionner, vendre l’électricité au prix qu’on se la vend pour se chauffer, c’est un crime économique. C’est un crime contre l’humanité, mais c’est pas reconnu au Québec.’’

Wow.

Un crime contre l’humanité!

Marcel Côté a vraiment fait entrer la subvention des tarifs d’hydroélectricité dans cette sombre catégorie qui inclut généralement les génocides…

Avec, en prime, un petit rire satisfait, en conclusion. »

Sympathique, n’est-ce pas, le monsieur?

Quant à la question nationale, Côté s’est évertué, particulièrement durant les années entourant le dernier référendum, à prédire une effroyable déconfiture économique du Québec en cas d’indépendance. Un discours quasi apocalyptique qui n’avait qu’un but : faire peur aux Québécois (voir notamment son livre Le rêve de la terre promise (les coûts de l’indépendance), Stanké, 1995).

Et que des indépendantistes, telle Louise Harel, piétinent leurs convictions en faisant partie de sa « coalition » ne change rien à l’affaire… C’est même le boutte de la marde.

Mélanie Joly : la jeunesse… libérale

La candidate Mélanie Joly, peu connue au départ, mais qui semble faire sa place dans la course (aidée de certains médias qui s’entichent de plus en plus d’elle), au point où elle est deuxième selon certains sondages, a-t-elle quelque chose à offrir? Rien de bien rassurant dans son parcours, en tout cas.

Pensons par exemple que, lors de la course à la chefferie du Parti libéral du Canada, elle était l’organisatrice en chef pour le Québec de la campagne de Justin Trudeau… Une autre trudeauiste qui aspire à la mairie de Montréal? Il semble bien que oui!

Madame Joly a aussi montré où elle loge lors du conflit étudiant de 2012. Dans une lettre ouverte à un manifestant, elle recommandait aux étudiants d’accepter la seconde « offre » libérale en ces termes :

« Ne te rends-tu pas compte, cher manifestant, que la hausse dénoncée aujourd’hui aura nécessairement un impact sur la hausse de demain. La hausse de tous les tarifs de l’État, de l’électricité, en passant par la santé et les cotisations aux régimes de retraite. Détrompe-toi, je ne la veux pas plus que toi, mais n’est-ce pas mieux d’accepter les dernières offres liées à la bonification des prêts et bourses, obliger un meilleur financement des universités et ensuite, réclamer un véritable plan des générations? Un plan de match qui saurait répartir le poids financier de notre système équitablement par génération? Tu augmentes les frais de scolarité, j’accepte de payer 10$ pour la garderie et ma mère paie 300$ par année pour l’utilisation du système de santé. On développe notre potentiel énergétique québécois et on augmente les pénalités aux entreprises polluantes. Deal? »

Quel beau plan de match néolibéral… No deal.

Richard Bergeron : les apparences du progressisme

Reste donc Richard Bergeron parmi les principaux candidats, ceux en tout cas que nous vendent les médias. Celui-là, il semble attirer beaucoup de sympathie chez les indépendantistes et les progressistes. C’est que Projet Montréal, son parti, s’est construit (parfois à raison) une image progressiste. Mais si on va un peu plus loin…

Il faut tout d’abord savoir que la colistière de Bergeron est Janine Krieber. Qui est-elle? Cette dame est l’épouse de Stéphane Dion, architecte de la ligne dure contre le Québec chez les libéraux fédéraux. J’entends déjà les grands cris des défenseurs de Projet Montréal… « Mais ça ne veut rien dire, Madame pourrait très bien être indépendantiste! » Or, dans les faits, rien de bien surprenant : Madame a toujours appuyé son mari et ses projets politiques. Pas moi.

Ensuite, après avoir donné l’apparence d’être le chef du parti le plus progressiste lors du conflit étudiant de 2012, le chef de Projet Montréal a remis les choses au clair dans une récente entrevue accordée à… Stéphane Gendron. Il a entre autres déclaré sur Radio-X que « sa » police de Montréal a très bien fait son travail en 2012. Il a en outre affirmé qu’il interdirait sous son règne la manifestation contre la brutalité policière. Il a aussi dit qu’il ne contesterait plus l’antidémocratique règlement P6, dont il ne veut plus entendre parler. Stéphane Gendron jouissait à entendre tout ça!

C’est ça, votre progressiste? Non merci.

Un vote à la Chartrand? Peut-être pas…

Alors, on fait quoi avec la mairie de Montréal? Un vote à la Michel Chartrand? « Toutes ces gentilles personnes nous veulent du bien, on met des X partout… » Peut-être pas.

Il y a aussi l’éditeur Michel Brûlé. Je ne le connais pas personnellement, mais son discours détonne et est plutôt rafraîchissant, sans compter que c’est le seul candidat clairement indépendantiste. Ses principaux chevaux de bataille : francisation de Montréal, lutte contre la corruption, abolition du règlement P6… Très intéressant. C’est aussi le seul des candidats qui soit pour une charte de la laïcité, les autres pataugeant dans le multiculturalisme canadien. Il se démarque, c’est évident. Allez voir le site de son parti, Intégrité Montréal. Brûlé et ses candidats présentent un programme cohérent, progressiste et indépendantiste.

Sauf qu’on nous dit que Brûlé n’est pas un candidat sérieux… Peut-être. C’est vrai qu’il fait parfois des choses un peu spéciales, et parfois certaines de ses analyses sont un peu bizarres… Ok, oui, peut-être. Je ne suis pas toujours d’accord avec lui, d’ailleurs. Mais avez-vous vu les autres?!

Vous le trouvez sérieux, l’Elvis Gratton du PLC? Vous le trouvez sérieux, l’autre fédéraliste qui compare les assos étudiantes à la mafia? Et l’organisatrice de Justin-je-déboule-les-marches-Trudeau, vous trouvez ça sérieux? Et l’autre encore, avec sa colistière ultra fédéraliste et ses déclarations à la radio-poubelle sur « sa » police de Montréal et l’interdiction des manifestations, c’est sérieux, ça?

Brûlé manque peut-être parfois de sérieux. D’accord. Mais côté farfelu, il ne peut pas battre les quatre autres, désolé. Impossible.

Si j’étais un Montréalais, Brûlé aurait mon vote.

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