Histoires de juges

Sous l’effet de la pression, Jean Charest a dû jeter un os à ses détracteurs qui ne cessent de réclamer une commission d’enquête sur la corruption au Québec, et ce, en mettant sur pied une commission dont le mandat était d’analyser le processus de nomination des juges au Québec. Jean Charest se disait que ce secteur d’activités serait le moins éclaboussant pour lui et les siens.  Afin de s’en assurer encore davantage, il confia la direction de la bidon commission à un ami du régime, le juge Michel Bastarache.  Dans de telles circonstances, nul ne doit être surpris de la faible récolte que procura cette commission.  Les dés étaient pipés et les conclusions quasiment connues d’avance.

En enquêtant sur les donateurs du Parti libéral du Québec, il est quand même possible de découvrir des histoires de juges qui étaient jusqu’ici passées sous le radar.  En récoltant des informations sur les donateurs dont les noms et les coordonnées se trouvent sur le site que nous avons mis en ligne et qui fait tant rager les libéraux, j’ai appris des trucs sur certains juges. C’est le cas notamment du juge Jean-Louis Lemay.

Celui-ci a été nommé à la Cour du Québec le 25 mars dernier par la ministre Kathleen Weil, la seule ministre libérale qui donne 3000$ à son parti, soit-dit en passant.  Le juge Lemay exerce principalement ses fonctions à la Cour criminelle et pénale de Québec. M. Lemay est détenteur d’une licence en droit civil de l’Université d’Ottawa. Il a été admis au Barreau en 1994. Il a entamé sa carrière au sein de la firme Gaulin Linteau Croteau. De 2006 à 2007, il a été bâtonnier du Barreau de Québec. Depuis 2006, il était avocat au sein du cabinet Corriveau Lemay Gauthier.

Dans le nom de ce cabinet, nous retrouvons « Gauthier ».  Gauthier, comme dans Sophie Gauthier.  Cette avocate connaît Monsieur le juge depuis belle lurette.  Déjà en 1999-2000, ils siégeaient tous deux sur le conseil d’administration du Jeune Barreau du Québec.  Les deux ont depuis parcouru bien du chemin… ensemble.  Au sein de cabinets de Québec où ils ont tous deux travaillé, mais aussi en tant que couple ;  Sophie Gauthier est la conjointe du juge Lemay.

En 2009, Sophie Gauthier a remis un généreux chèque de 3000$ au Parti libéral de Jean Charest.  Quelques mois plus tard, son époux accédait, à un jeune âge il faut bien le dire, à un poste de juge grâce à une ministre de Jean Charest.  Cela n’est très certainement qu’une coïncidence.  Mais celle-ci laisse songeur quand même.

Grâce au site sur les donateurs que nous avons mis en ligne, il y a toutes sortes de personnes qui ont communiqué avec nous pour nous parler du Parti libéral.  Parmi celles-ci, il y a même eu des anciens militants de ce parti.  Certaines de ces conversations ont porté sur le militant libéral de Drummondville, Serge Ménard (à ne pas confondre, bien sûr, avec le député bloquiste) qui finance généreusement le parti de Jean Charest. Celui-ci en mène très large dans ce coin du Québec.  Nous aurons l’occasion d’en parler abondamment.  Pour l’instant, concentrons-nous exclusivement sur la question des juges.

En 2006, la fille de Serge Ménard, Marie-Josée de son prénom, a été nommée juge à la Cour du Québec par le gouvernement Charest.  À l’époque, c’était Yvon Marcoux qui assurait les fonctions de ministre de la Justice.  M. Ménard s’est bien défendu d’avoir intercédé en faveur de sa fille auprès des libéraux qu’il connaît très bien puisqu’il a présidé l’Association libérale provinciale de la circonscription de Drummond dans les années 1990 et au début des années 2000. Depuis 2008, il préside l’Association libérale fédérale de cette même circonscription.

Mais une autre histoire de juge gravite autour de M. Ménard.  Celle de Gilles Lafrenière celle-là.  À l’automne 2009, Gilles Lafrenière a été nommé juge à la Cour du Québec par la ministre libérale Kathleen Weil.  Il exerce depuis ses fonctions à la chambre criminelle et pénale, à la chambre civile et à la chambre de la jeunesse.

Me Lafrenière devenait ainsi le troisième juge originaire de Drummondville à siéger dans cette Cour, les autres étant Marie-Josée Ménard et Gilles Gagnon.

L’ex-militant libéral à qui nous avons parlé nous a confié que Gilles Lafrenière est un très bon ami de Serge Ménard, militant libéral qui a été nommé par le gouvernement Charest sur le conseil d’administration de la Société d’assurance automobile du Québec en 2008.  Ce qui n’est en rien étonnant du moment que l’on considère que Serge Ménard a été maire de Drummondville de  1983 à 1987.  Parmi les conseillers municipaux qui l’épaulaient, l’on retrouvait Robert Lafrenière qui a par la suite mis sur pied la structure permettant de présenter la fête du Canada dans la région.  Nos sources nous confirment que Robert Lafrenière est le père de Gilles Lafrenière ; les deux  sont des amis du militant libéral Serge Ménard. 

Cela aussi, ça ne doit être encore une fois qu’une coïncidence, mais elle laisse tout aussi songeur que le cas du juge Jean-Louis Lemay.

 

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