Fallait pas que ça arrive

C’est hier soir que je l’ai su. Au téléphone.  J’étais en Gaspésie.  Le suis toujours d’ailleurs. J’ai beaucoup réfléchi à la situation après avoir raccroché. Pas beaucoup de positif m’a traversé l’esprit. J’ai donc passé une fort mauvaise nuit.  Pas dormi beaucoup.

Faut dire qu’Aussant m’avait remonté le moral politique comme pas un ne l’avait fait depuis ben longtemps.  Le type a un je-ne-sais-quoi de rafraîchissant.  Y’est brillant, pis ça se sent.  Pis y’est très indépendantiste.  Ça se sent aussi.  Il donne envie de le suivre, de retourner au front pour en finir une fois pour toutes. Grâce à lui, j’avais à nouveau confiance, quoi. 

Son départ me fait d’autant plus mal que je n’étais pas embarqué dans son bateau faute de mieux.  J’y étais parce que je croyais en lui, en sa force, en l’équipe qu’il était parvenu à réunir.  Et maintenant ?  Bang.  Un coup de masse dans le front.  Encore un autre. J’suis Québécois, j’commence à être habitué, mais quand même.

Aussant se dit un éternel optimiste.  Ça fait que lui, y’est sûr que l’aventure ON va se poursuivre.  Moi, ben j’suis un éternel pessimiste.  Ça fait que j’suis moins sûr que lui que ça va bien aller pour nos lendemains onistes.

Être moins enthousiaste quant à l’avenir d’ON, c’t’une chose que j’me dis.  Mais c’est que je suis de moins en moins enthousiaste quant à l’avenir du Québec aussi, pis ça, c’est pas mal pire.  J’nous regarde aller collectivement, pis ça m’inquiète.  Tout semble foutre le camp.  Les mafieux sont partout, y’ont tout gangrené.  Quand c’est rendu qu’on envoie des maires en prison pour gangstérisme, c’est qu’il y a quelque chose de pourri.  Pis pas seulement au Danemark.  Chez nous aussi.  J’veux bien croire que ce sont des libéraux pis qu’on peut pas en attendre beaucoup mieux, mais quand même. 

Pis j’aime mieux pas parler de la langue, de l’environnement, de la droite qui sévit partout, et tutti quanti.

Dans notre « famille », ben c’pas mieux.  Le PQ qui nous vend au plus offrant, y’m’donne juste envie de vomir.  Je ne reconnais plus ce parti.  Je n’ai pas envie de marcher à ses côtés.  J’ai juste envie de lui mettre des bâtons dans les roues pour le voir capoter.  Des libéraux habillés en rouge ou en bleu, ça reste des libéraux.  Pis ça m’écoeure.

Chez les solidaires, c’est sympathique.  Mais y’ont pas le courage de changer l’essentiel.  Pis l’essentiel, c’est de retrouver notre liberté.  Pis ça, ben c’est surtout pas la priorité de Françoise pis de l’autre là, Fontecilla.

Et là, mon chef qui part.  Me sens vraiment comme un orphelin politique…

J’n’étais quand même pas assez épais pour penser que Jean-Martin allait tout régler à lui seul. Mais à la tête de son équipe, qui forme autre chose qu’un maudit vieux parti pourri, j’me disais qu’on avait au moins de quoi espérer.  Croire enfin que les choses pouvaient changer au Québec.  Pour le mieux.  Mais voilà, mes rêves partent aujourd’hui avec le chef qui est allé retrouver sa famille.  J’peux pas lui en vouloir.  J’comprends.  Mais ça m’fait mal pareil.

Fallait vraiment que je l’aime ce chef-là pour accepter que notre parti lui verse un salaire de 90 000$ par année.  J’trouvais ça beaucoup lorsqu’on nous l’a annoncé au congrès de mars dernier.  J’l’ai dit au micro d’ailleurs.  J’trouve encore ça beaucoup.  Mais je crois vraiment que c’est pas parce que plusieurs militants ont beaucoup souffert au service de la cause qu’on doit en exiger autant des autres. Un excellent chef méritait un excellent salaire, j’le pensais au congrès et j’le pense toujours !

Et maintenant ?  Ben, j’sais pas.  Le Québec mourra pas demain matin, c’est ben certain.  Mais une chose est sûre, cette mauvaise nouvelle n’améliorera pas la situation, c’est le moins qu’on puisse dire. 

Heureusement qu’on a l’été pour panser nos plaies.  On se reverra à l’automne, j’imagine.  Probablement plus meurtris que jamais.  Mais toujours décidés à éviter le pire.  À survivre encore un peu à défaut de vivre pleinement.

Et c’est là que je me prends à penser à Falardeau.  À nouveau.  « Sans espoir mais avec détermination »,  citation d’Orwell qu’il nous garochait à tout bout de champ par la tête.  Oui, c’est en plein ça.  Sans espoir, mais avec encore plus de détermination.

On n’a pas ben ben l’choix.  Puisqu’on n’a tout simplement pas le droit de perdre.

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