Succès électoral pour la Catalogne libre

 

De fait, les socialistes du Parti socialiste catalan (PSC) ont enregistré leur pire score depuis 30 ans, ce qui est de fort mauvais augure pour les socialistes de Zapatero qui dirigent eux le parlement espagnol et qui devront se soumettre bientôt au verdict populaire (mai 2011).  La crise économique qui frappe durement la péninsule ibérique a choqué les citoyens.  Ils en tiennent rigueur aux socialistes, d’où la popularité enregistrée dans les sondages espagnols pour le Parti populaire, cette formation conservatrice qui a toujours combattu âprement les velléités indépendantistes basques, catalanes ou galiciennes.

Mais en Catalogne, les socialistes devaient faire face à un autre problème, beaucoup plus délicat celui-là.  Le gouvernement Zapatero doit y conjuguer avec une résurgence nationaliste, et ce, depuis que le Tribunal constitutionnel d’Espagne a charcuté le nouveau contrat d’autonomie (Estatut) qui a été adopté par voie référendaire en 2006.  Les juges ont biffé tous les passages liés à l’identité catalane, ce qui a choqué profondément ce peuple en lutte.  D’où la montée à peu près sans précédent du sentiment indépendantiste en Catalogne;  les analystes les plus optimistes évaluent que l’appui à l’indépendance est passé de 15-20% à près de 50% à cause de la crise de l’Estatut.

Et cela s’est bien sûr répercuté dans les urnes dimanche dernier.  La parti Convergencia i unio dirigé par l’économiste Artur Mas a raflé la mise.  Les députés de ce parti nationaliste de droite sont désormais au nombre de 62 (une progression de 14 sièges) à la Generalitat ; six victoires de plus, et ce parti obtenait une majorité absolue.

Historiquement, le parti Convergencia i unio (qui a été au pouvoir en Catalogne de 1980 à 2003) a été timoré sur la question de l’indépendance.  Et il le demeure encore en 2010.  Toutefois, la crise de l’Estatut remue bien des choses à l’intérieur du parti anciennement dirigé par le leader nationaliste historique Jordi Pujol.  Une aile indépendantiste y est de plus en plus influente.  Le chef Mas a même déclaré qu’il voterait Oui à un référendum portant sur l’indépendance de la Catalogne, une région prospère d’Espagne.  Mais ajoutant du même souffle que la question nationale n’était pour l’instant pas la priorité en Catalogne qui est elle aussi frappée durement par la crise économique.

Les indépendantistes ne doivent toutefois pas désespérer.  Si Convergencia i unio demeure tiède face au combat indépendantiste à mener, d’autres indépendantistes le sont beaucoup moins et ils sont eux aussi présents à la Generalitat.  Ceux d’Esquerra Republicana de Catalunya notamment.  Bien que les Catalans aient puni ce parti pour le travail qu’il  a effectué à l’intérieur de la Generalitat au cours des sept dernières années, ERC a tout de même conservé dix sièges sur les 21 qu’il contrôlait au déclenchement des élections.  ERC, formation de gauche qui plaide en faveur de la tenue d’un référendum sur l’indépendance de la Catalogne, pourra jouer de son influence à l’égard de Convergencia i unio qui forme un gouvernement minoritaire et qui devra par conséquent bénéficier du soutien d’autres formations politiques pour imposer ses positions politiques à la Generalitat.  Tant qu’à négocier avec la gauche, le gouvernement de Mas préférera sans doute le faire avec des nationalistes qu’avec les tenants de l’unité espagnole du PSC qui conserve malgré tout 28 sièges.

Les indépendantistes les plus pressés ont été également heureux de voir le relatif succès remporté par la formation Solidaritat catalana per la independencia dirigée par Joan Laporta, cet ancien dirigeant du FC Barcelona, le mythique club de foot catalan.  Ce nouveau parti qui prône une déclaration unilatérale d’indépendance, sans passer par la voie référendaire, a récolté 3,28% des votes et a fait élire quatre députés, dont le charismatique Laporta lui-même.

Ensemble, les trois formations nationalistes catalanes occupent 76 sièges, ce qui représente une majorité très confortable, et ce, malgré le fait qu’elles aient reçu l’appui de seulement 48,75% des électeurs.

Si tous ces politiciens parviennent à s’entendre (ce qui représente tout un défi il est vrai), la Catalogne libre risque de progresser encore davantage dans les prochaines années.

Et c’est à souhaiter !

 

Posted in chroniques politique étrangère, Journal Le Québécois.