Facal affirme ici que multiculturalisme et souverainisme sont en complète contradiction. Dans sa colère contre QS, il feint de ne pas voir que le multiculturalisme canadien, auquel il réfère, est avant tout une posture. Le Canada aime bien, quand ça l’arrange, mettre de l’avant une image de diversité ethnoculturelle, derrière laquelle tout le monde sait bien que l’intégration du plus grand nombre à la culture dominante anglo-américaine est, à terme, absolument incontournable.
Quoi qu’on pense d’une telle philosophie, il est tout à fait imaginable qu’un Québec indépendant l’adopte en tout ou en partie, à la faveur de sa culture dominante à lui, comme il est tout aussi imaginable qu’il choisisse un modèle d’intégration différent, peut-être moins hypocrite.
Ce n’est pas avec le souverainisme que le multiculturalisme à la canadienne est incompatible, mais plutôt avec le maintien du Québec dans le Canada, là où le multiculturalisme devient un moyen de noyer l’identité québécoise dans la mosaïque anglicisante du pays de Trudeau.
Quand un souverainiste comme Facal fait de la lutte au multiculturalisme une priorité ainsi qu’un point de clivage entre les bons et les mauvais souverainistes, il montre qu’il n’a aucun espoir de voir l’indépendance se réaliser dans l’avenir prévisible — ce qui est avéré dans son cas — et qu’il se rabat par conséquent sur le nationalisme provincial. C’est ce que fait également une grande partie de l’intelligentsia souverainiste, avec pour résultat l’affaiblissement constant du mouvement indépendantiste, dès lors plongé dans la confusion — est-ce qu’on veut l’indépendance, ou plutôt la lutte identitaire à l’intérieur du Canada? — et affligé de coûteux tiraillements entre « nationalistes » et « inclusifs ».
Mettre l’indépendance de l’avant, ce à quoi se refuse de toutes ses forces le Parti québécois, aurait l’avantage de canaliser dans une direction commune les énergies des premiers et des seconds. En effet, lorsqu’on est activement indépendantiste, on est obligé à la fois d’inclure au maximum, et d’assumer pleinement une démarche d’affirmation nationale. Voilà une gymnastique qui ferait du bien à tous les esprits, dans ce mouvement dont le Québec mérite beaucoup mieux que les tergiversations actuelles.