Requête historique de l’épouse de Raif Badawi

La conjointe de Raif Badawi, madame Ensaf Haidar, a récemment adressé une requête publique au premier ministre Trudeau. Pour des raisons de sécurité, elle demande au gouvernement canadien d’accélérer le traitement de sa demande de citoyenneté pour elle-même et ses trois enfants. Elle lui demande également d’accorder à son mari le statut de citoyen honoraire », ce qui accentuerait la pression sur les autorités saoudiennes.
Cette requête n’a rien d’irréaliste ou d’exagéré. Sa famille n’est pas arrivée au Canada incognito ou par voies illégales, son dossier est étoffé, connu et reconnu à l’international comme au national, il ne prête flanc à aucun malentendu ni aucune mésinterprétation. L’attentisme gouvernemental ne réside évidemment pas dans les dédales procéduriers propres à ce type d’évaluation.

Ensaf et ses enfants sont des réfugiés politiques vivant ici depuis cinq ans, citoyens exemplaires parfaitement intégrés à notre société, acceptés et soutenus par l’ensemble des Canadien-ne-s. Leur situation requiert une attention particulière ne relevant pas du passe-droit, Ensaf ne demande pas de traitement de faveur, elle fait appel au sentiment et au bon sens humanitaires du premier ministre, lui rappelant qu’il y a des précédents similaires à sa requête, que le gouvernement a le pouvoir politico-administratif d’approuver certaines requêtes aux caractéristiques hors de l’ordinaire.

Promouvoir le respect des droits humains n’est pas une affaire de selfies, c’est une démarche exigeante et engageante, dont on ne peut se réclamer d’une main et se dissocier de l’autre. Or, après avoir clamé son soutien à Ensaf et s’être affiché à ses côtés, coup sur coup le gouvernement lui a asséné deux camouflets.

Premier camouflet, lorsqu’en décembre dernier Omar Alghabra, d’origine saoudienne et secrétaire parlementaire du ministre canadien des Affaires étrangères, relayait à Ensaf la suggestion de l’ambassade saoudienne de solliciter le pardon de son beau-père pour Raif, cet homme mentalement dérangé qui fut le principal persécuteur de Badawi, réclamant même l’assassinat de son propre fils. Toute personne au courant du dossier sait que la solution pour libérer Raif ne relève pas de sa famille d’origine et ne peut être que politique.

Le cynisme, l’inutilité et la nuisibilité d’une telle démarche ne pouvaient échapper au gouvernement, la proposition étant en fait un piège à deux volets : transférer sur les épaules d’Ensaf la responsabilité du sort de son mari et la discréditer dans l’opinion publique comme conséquence de son éventuel refus, tout à fait justifié, de ne pas lui donner suite; cette demande de pardon équivalait pour Raif à une reconnaissance de culpabilité et par conséquent donnait raison à ses bourreaux.

Second camouflet, en transférant la requête récente d’Ensaf au ministère de l’Immigration qui, à son tour, répond laconiquement qu’il « s’engage à aider les nouveaux arrivants à devenir citoyens plus rapidement », sans aucune mention de la requête. Pour mieux banaliser celle-ci et suggérer au public que le cas de cette famille n’est pas exceptionnel, le porte-parole du ministre ajoute « qu’avec son projet de loi C-6 adopté en juin dernier, (le gouvernement) rétablissait un traitement équitable pour les citoyens, peu importe leurs antécédents ».

Est-il besoin de rappeler que madame Haidar et ses enfants ne sont plus de « nouveaux arrivants », qu’ils vivent ici depuis cinq ans et ont le statut de « résident permanent »! De rappeler de surcroît qu’Ensaf a des responsabilités l’obligeant à voyager régulièrement à l’étranger, considérant justement l’exceptionnalité de leur situation!

Monsieur Trudeau, par plusieurs aspects la situation des membres de la famille Badawi-Haidar est exceptionnelle et historique, et le sont aussi les décisions que vous prenez à leur égard.

Plus que toute autre décision, celle de leur accorder sans plus tarder leur citoyenneté canadienne sera considérée comme un geste humanitaire et politique qui inscrira votre gouvernement dans l’Histoire comme défenseur de nos valeurs les plus fondamentales -qui sont aussi celles de Raif et d’Ensaf- et vous confortera dans l’esprit collectif des Canadiens comme un humaniste qui affirme ces valeurs à la face du monde.

Ne ratez pas cette occasion historique, car ce sont tous les Canadiens que vous honorerez par cette décision.

Robert Duchesne, Trois-Rivières

Posted in à la une, chroniques politique étrangère, Journal Le Québécois.

Un commentaire

  1. Il faut appeler un chat un chat et si Monsieur Saint-Laurent TRUDEAU est véritablement le détenteur du pouvoir Qu’il lui a été accordé le rapatriement et la réunification de cette famille est pour ainsi dire réglé mais considérant la décision négative la preuve saura faite que l’oligarchie mondialiste est réellement opérationnelle et véridique à vous la parole monsieur le premier ministre du Canada Justin thé Beaver-club Trudeau

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