Le porte-parole Solidaire relève le gant que lui a lancé la CAQ en affirmant que la campagne électorale est devenue une lutte à deux. Pourtant les deux sondages post-débat démontrent plutôt que Québec solidaire, Libéraux et Conservateurs sont statistiquement à égalité avec un PQ qui court derrière et pourrait les rejoindre. Québec solidaire a décidé qu’il lui était électoralement rentable de jouer le jeu de la CAQ qui le démonise afin d’inciter l’électorat tenté par les Libéraux et les Conservateurs à voter CAQ pour affaiblir si ce n’est marginaliser Québec solidaire perçu comme une bande de gauchistes. Côté Solidaire, la tactique caquiste est vue comme une accentuation des chances de faire des Solidaires l’opposition officielle. Peut-être aussi pense-t-on, que dans certaines circonscriptions montréalaises multiethniques où la lutte est serrée, telles Verdun, St-Henri-SteAnne, Maurice-Richard, Viau — où les candidatures furent choisies par la direction souvent au détriment de candidatures locales — que la tactique caquiste pourrait être inversée au profit des Solidaires afin de regrouper le vote pour rejeter la CAQ identitaire.
Québec solidaire et la CAQ s’entendent finalement sur une même tactique les avantageant réciproquement mais aux dépens de la vérité des sondages. Pendant ce temps, le PQ, n’ayant plus rien à perdre et à l’abri des attaques, se rabat sur la franche promotion tranquille de l’indépendance enrobée d’un fort populisme qui mange autant dans le râtelier de gauche côté dépenses sociales et environnementales(Francis Vailles, Comment la gauche et la droite jouent avec nos finances, La Presse, 17/09/22) que dans celui de droite en évitant les hausse d’impôts de type Solidaire et en tenant à l’écart l’immigration. Nonobstant toutes les failles béantes de cet indépendantisme sans processus d’accession afin d’éviter l’inévitable débat référendaire et refusant de se situer sur l’axe
gauche-droite malgré l’incontournable polarisation sociale qui l’y oblige, le PQ marque des points et pourrait rejoindre le peloton des prétendants à l’opposition officielle.
Quel est le secret de ce modeste succès qui pourrait cependant vite se dégonfler ? La soif éperdue de l’électorat progressiste pour une alternative qui réponde aux crises multiples d’un capitalisme néolibéral paraissant à bout de souffle. Pour plusieurs, l’indépendance est le phare sur la colline indiquant la direction à prendre pour pénétrer dans le Pays de Cocagne. Pourquoi n’est-ce pas Québec solidaire qui soit le porteur de cette alternative lui dont la plateforme, nettement de centre-gauche et écologique, affiche une assemblée constitutionnelle indépendantiste dans le premier mandat débouchant sur un référendum aussi dans le premier mandat selon la réponse du porte-parole à une question précise en ce sens de Patrice Roy de Radio-Canada lors de l’entrevue des cinq chefs du 4 septembre (à 9:40 minutes). Le problème en est un de crédibilité : les porte-parole
Solidaires ne parlent d’indépendance que lorsque qu’on les met au pied du mur pour ce faire alors que le PQ fait feu de tout bois sur le sujet.
Une « vision » toute capitaliste dans le sillage tout électrique de la CAQ
On peut se demander pourquoi le concret plan climat Vision 2030 de Québec solidaire ne rivalise pas avec succès avec le contradictoire indépendantisme à la mode PQ ? C’est que cette vision capitalisme vert de marché et taxe carbone laissant le dernier mot aux transnationales libres de la répartition mondiale de leurs capitaux grâce au libre-échange non remis en question par les Solidaires, et de bonus-malus accélérant la pénétration des véhicules privés électriques du nouvel extractivisme, du renouvellement de la consommation de masse et de celui de l’étalement urbain ne se distingue du tout électrique de la CAQ que pas ses immobilisations pharaoniques dans le
transport en commun faute de se substituer au règne de la « petite reine » sur la terre ferme. Faut-il se surprendre que le porte-parole Solidaire « invite les électeurs à oublier les bouts du programme politique de QS où il est question de « restreindr[e] le port des armes à feu par les agentes et agents publics (police) et privés (agences de sécurité) », de « nationalis[er] de grandes entreprises dans certains secteurs stratégiques » comme ceux des ressources naturelles et de l’énergie ou encore de « vise[r], à long terme, la socialisation des activités économiques » pour accorder toute leur attention à la plateforme électorale. » (Marco Bélair-Cirino, La CAQ cherche à «démobiliser» le vote des jeunes, accuse QS, Le Devoir, 20/09/22).
Mieux vaut pour le peuple travailleur et citoyen se mobiliser sur ses propres bases comme le feront demain, le 23 septembre, pour l’élimination complète des énergies fossiles de la société québécoise d’ici 2030 et pour un investissement massif dans les services publics, une grève-manifestations d’au moins 22 syndicats de 13 754 travailleur-se-s, 51 associations étudiantes de 128 180 membres et 350 groupes communautaires. Si se présentait aux manifestations l’un ou l’autre politicien-ne en campagne électorale, ce serait pure usurpation car aucun parti politique en lice ne porte les deux grandes revendications de l’événement, même pas Québec solidaire.