François Legault, Maria Mourani, Michel Gauthier, Stéphane Gobeil, François Rebello, Lucien Bouchard… La liste des têtes d’affiche et des noms connus qui ont, au fil du temps, plus ou moins déserté, déçu, quitté ou renié le mouvement indépendantiste, est longue. En fait, quand on y pense, elle est, tant qualitativement que quantativement, unique en son genre. Ni les « fédéralistes », ni les conservateurs, les nationalistes ou les progressistes ne connaissent un tel phénomène de défections spectaculaires récurrentes.
Ce que nous indique cet état de choses, c’est que l’indépendance du Québec est un projet qui, si on veut le maintenir à l’ordre du jour et peut-être parce qu’il va à l’encontre des blocages les plus profonds de la psyché québécoise, doit être porté à bout de bras, contre vents et marées, par un leadership absolument exceptionnel, doté d’une détermination hors du commun. Depuis une trentaine d’années, nous n’avons connu qu’un seul leader répondant, au moins pour un temps, à cette exigence: Jacques Parizeau. Ceux qui prétendent que Parizeau a pu agir comme il l’a fait en 1995 parce qu’il fut le chanceux bénéficiaire d’un contexte extraordinairement favorable, tournent les coins ronds et réécrivent l’histoire. Ils oublient, d’une part, que l’ex-chef péquiste a lui-même été un élément essentiel dans l’avènement dudit contexte, et d’autre part, que la poussière de l’après-Meech était passablement retombée, déjà en 1994, et que tout au long de l’année 1995, l’élite péquisto-souverainiste, devant des résultats de sondages assez semblables à ceux d’aujourd’hui, recommandait avec insistance au chef péquiste ce qu’elle recommande encore à tout venant: attendre, toujours attendre, sous peine, selon elle, de courir à la débâcle certaine. On a fait des pieds et des mains, au sein même de l’establishment souverainiste, pour que le référendum n’ait pas lieu. On voulait d’abord « bien gouverner » pour prouver on ne sait quoi; les Québécois n’étaient pas prêts, ils ne voulaient pas de référendum, se lancer eut relevé de l’étourderie, etc etc. On connaît la chanson. Il fallait être un véritable extraterrestre pour tenir tête à toutes ces voix prêcheuses de peur et prendre la décision d’aller de l’avant quand même, envers et contre pratiquement tous. Ce que fit Parizeau. Cela n’est pas banal.
À peine Parizeau avait-il passé le pas de la porte de sortie que l’irrésistible force de la peur et de la procrastination s’y engouffrait dans l’autre sens, comme une sorte de naturel qui revient au galop. Près d’un quart de siècle d’attentisme acharné plus tard, la direction péquiste incarne plus que jamais la démission et le confinement à la perspective priovinciale, alors que le mouvement indépendantiste se délite et voit ses diverses composantes d’autrefois se disperser. Bien sûr, parmi les démissionnaires et les infidèles qui reçoivent ponctuellement l’anathème des militants déçus — Traître à la nation! Vendu! Opportuniste!, leur crie-t-on toujours — il y a des indépendantistes moins ardents, voire même, à la conviction vascillante. Leur adhésion aux partis souverainistes traditionnels est héritée de l’époque où le PQ menait une démarche indépendantiste active, forte et crédible, se donnant alors la capacité de rassembler bien au-delà du noyau de ceux dont l’indépendance est la priorité absolue, la cause entre toutes. Le PQ étant redevenu un parti provincial sans projet d’indépendance concret, Il est tout à fait normal que certains indépendantistes circonstanciels aillent aujourd’hui voir ailleurs, pendant que d’autres restent pour diverses raisons.
Plutôt que de se perdre en chasses aux sorcières et en excommunications, il serait temps de regarder le vrai problème en face: eux-mêmes logés à l’enseigne de l’hésitation et du manque de confiance en soi qu’ils reprochent si souvent à leurs compatriotes, les indépendantistes québécois, même les plus fervents, ont bien de la difficulté à croire en leur projet. En fait, ils n’y croient tout simplement pas. Le PQ n’y croit pas, le Bloc de la vieille garde non plus. Elles sont là, les raisons de la caquisation, mais aussi de la tailleferisation et de la marissalisation de la politique québécoise. Et, bien que d’une autre façon, de la ouellettisation du Bloc, aussi.
Les péquistes encore épris d’indépendance qui villipendent les infidèles l’oublient bien commodément: pendant qu’une multitude d’anciens tenants du OUI appuient des partis non-indépendantistes, leur propre parti, le PQ, est rempli de gens que jamais personne n’a entendu tenir un plaidoyer indépendantiste digne de ce nom, mis à part, parfois, l’occasionnelle figure imposée, débitée mollement devant des parterres de convertis, quand vient le temps des campagnes de financement ou des investitures. Des Legault et des Gauthier, comme, d’une certaine façon, des Taillefer et des Marissal, le PQ en compte des dizaines. Vous en doutez? Cette affirmation vous fait grimper dans les rideaux? Faisons un exercice: pensez à un membre du caucus péquiste. Au hasard. N’importe lequel. Puis, demandez-vous si vous avez déjà entendu cet individu, dans le quotidien, devant les micros et les caméras et hors des assemblées partisanes confidentielles, tenir un discours indépendantiste élaboré, cohérent et enthousiaste. Cherchez sur Google une citation; fouillez dans les archives des grands médias. Quand vous n’aurez à peu près rien trouvé, essayez avec un autre membre du caucus. Ce sera la même chose. Essayez-en un autre. Et ainsi de suite. Vous finirez par voir que, d’un point de vue indépendantiste, ils pourraient pratiquement tous se joindre à la CAQ, au PC, au NPD ou même au PLQ ou au PLC. Pas parce qu’ils sont tous des fraudeurs intellectuels, mais bien parce que le clivage sur la question nationale, avec le concours plein et entier du PQ, est aujourd’hui flou et supplanté par d’autres clivages, au PQ comme ailleurs.
Tant qu’une voix forte ne sifflera pas le départ du train, le quai de la gare restera le théàtre de toutes les dispersions, de toutes les digressions et de toutes les désillusions. Pour les indépendantistes s’entend, comme pour tous ceux dont les aspirations étaient autrefois bien servies par un indépendantisme fort.
Pour l’heure, quand les péquistes brûlent en effigie des « traîtres à la cause », tout comme quand ils dénoncent le provincialisme de leurs compatriotes, c’est, au fond, contre eux-mêmes qu’ils sont fâchés.
Catherine Fournier, de Marie-Victorin, la plus jeune députée de l’Assemblée, peut-être fouettée par sa consoeur Hivon, travaillent sérieusement les jeunes qui n’en savent rien… et je n’ai pas fait l’inventaire… anyway, ça bat le chef bloquiste Gauthier, enseveli pendant dix ans et qui se réveille en amour avec le Canada…
Comme tout autre projet, l’indépendance d’un peuple se construit pierre par pierre, planche par planche. Comme une maison.
Le fait précède le droit. Nous devons dès maintenant oeuvrer à la construction d’un pays réel. Sa reconnaissance viendra plus tard. Et comme le disait Gérard Bergeron, « l’état devenait ce qu’il faisait ».En se donnant des politiques qui nous sont favorables: une loi 101 qui a des dents—-une banque d’investissement en infrastructures pour concurrencer celle du fédéral à Toronto—une Caisse d’abord au service des Québécois—l’achat chez nous—un état vraiment laique.
Jamais ni une élection ni un référendum ne construiront un pays
Votre solution: « Tant qu’une voix forte ne sifflera pas le départ du train… » Développer toute une théorie (leaders qui ne leadent pas) pour aspirer au messianisme! Alors que l’époque est à l’individualisme! Me myself and mon téléphone! On aurait beau ressusciter René Lévesque, chacun s’esclafferait devant ses costumes et ses tics faciaux. Personne ne se croit plus floué ou dominé: chacun vit comme le conquérant… ou le croit par les médias. C’est le jour où big brother d’emparera de la banque et que la carte débit ne répond plus, qu’on commencera à se poser des questions. Chanter en anglais à la Fête nationale, ils l’acceptent déjà, lire en anglais les panneaux routiers ou les publicités, ils s’en réjouissent même: leur musique américaine leur a appris les principaux mots. (Can talk english faster than you). Marcher sur la rue et rencontrer plus de signes religieux visibles que de « Tin, salut toé », tant mieux! On est don inclusifs!
La population ne se laisse plus prêcher, elle sait! Que nos leaders fassent assez ressortir les côtés assimilés des gouvernements, c’est tout ce qu’ils peuvent faire: tenir le fort et garder contact avec la génération qui jadis voyait. Ne pas ovationner à Ottawa en proclamant que le Canada est un beau pays. Être présents et visibles, sur le terrain, à la cabane à sucre, portant l’épinglette et l’expliquant à qui le demande… Tout ce qu’il faut pour demeurer visibles, faire ressortir l’image des corrompus, jusqu’à ce que les individualistes décident de voter pour le changement. C’est alors que les meilleurs tribuns n’auront qu’à illustrer le mur de la dénationalisation qui arrive vite! (pis encore!)