Que reste-t-il de nos appétits
quand l’avarice a tout violé,
quand la richesse des rires
est devenue rance
et que l’abondance de jadis
se perd en trompe-l’œil
dans la nécrose des cornées?
Que reste-t-il de nos élans
quand le présent s’est émoussé,
quand ce qui avait un sens
se soumet à l’impasse
et que l’unicité d’autrefois
se multiplie en échos brisés
dans les vitres des baromètres?
Que reste-t-il de nos immensités
quand la grandeur n’a plus d’échelle,
quand les plans ne se déchiffrent plus
qu’à l’aide d’une brique
et que les murs se dressent
en remords morcelés
au mitan des souvenirs?
Que reste-t-il de nos ovations
quand les crachats étouffent l’espoir,
quand la honte se meurt d’ennui
sous les faux-fuyants de toc
et que les portes closes
dans les passages de l’exil
prennent l’allure d’une trêve?
Que reste-t-il de nos urgences
quand plus personne ne saigne,
quand même les cicatrices se taisent
en pinçant les lèvres
derrière les brancards
et que les signes vitaux s’éteignent
sous le roucoulement des tourterelles?
Il reste l’oubli et la terre brûlée,
il reste la boue et la terreur,
il reste les éboueurs de l’éternel.
Les éboueurs de l’éternel
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