Le crime paie

Étions jeunes, nos parents ne manquaient jamais de nous dire que les mauvais coups que nous pourrions commettre ne resteraient pas impunis. Que d’une façon ou d’une autre, un jour ou l’autre, nos « crimes » nous retomberaient sur le nez, qu’on se ferait prendre et que nous en payerions les conséquences. C’était là une façon comme une autre de nous tenir bien tranquilles, j’imagine.

Aujourd’hui, je dois vous dire, pères et mères de chez nous, que vous nous avez menti. Les crimes demeurent très souvent impunis. Pire: ils paient même!

Il n’y a qu’à suivre l’actualité pour s’en convaincre.

Au cours des dernières années, le Québec a été témoin de tant de cas de corruption qu’il fallut mettre sur pied la Commission Charbonneau afin de jeter un peu de lumière sur les pratiques douteuses de l’industrie de la construction. Devant le commissaire Charbonneau, des têtes-à-claques ont paradé. On a constaté facilement leur culpabilité dans les cas de financement illégal concernant le parti libéral, et ce, afin d’obtenir en retour des contrats publics juteux. Ces pratiques abjectes ont scandalisé les Québécois.

On n’a pas oublié les noms de Lino Zambito, de Monsieur TPS (Gilles Surprenant), de Monsieur 3% (Bernard Trépanier), de François Thériault, de Robert Marcil, de Marc Bibeau, de Gilles Vaillancourt, de Nathalie Normandeau, de Julie Boulet, de Marc-Yvan Côté, de Pierre Bibeau, de Frank Catania, des firmes Infrabec, Genivar, Garnier, BPR, Roche, Mirabeau et compagnie.

Bien sûr, nul n’était assez naïf pour croire que la juge Charbonneau réglerait le problème dans son entièreté. Mais on se disait qu’une fois pointés du doigt, tous ces gens coupables d’ agissements douteux ne pourraient au moins plus faire la pluie et le beau temps au Québec.  On cherchait à se rassurer comme on le pouvait.

Ô combien naïfs nous étions. La plupart d’entre eux paradent toujours, comme avant, sur la place publique. La Normandeau s’est même trouvée un micro à la radio-poubelle pour abreuver le bon petit peuple de ses conneries.

Pire, on apprend ce matin que 75 individus reconnus coupables de financement politique illégal impliquant bien sûr le parti libéral viennent de récupérer leur droit d’obtenir des contrats publics. C’est grâce au projet de loi 26 du gouvernement Couillard que ces magouilleurs reviennent dans les bonnes grâces de l’État, sans qu’ils n’aient même eu à compléter leur ridicule punition de trois ans sur la liste noire. Ils ont volé le peuple québécois et n’ont reçu qu’une tapette sur le bout des doigts comme punition!  C’est désespérant…

Avouez que c’est quand même fantastique. Le Québec s’est époumoné durant des mois, voire des années, afin d’obtenir une commission destinée à faire la lumière sur les cas de corruption qui concernent à 99,9% le Parti libéral, et quand celui-ci revient au pouvoir, il adopte une loi qui sauve les fesses des crosseurs qui fricotent avec lui depuis toujours, relations condamnables qui constituaient la raison d’être de ladite commission!

Et là n’est malheureusement pas la seule porte de secours que peuvent emprunter les crosseurs afin d’éviter de payer les conséquences de leurs crimes. Attendre que le gouvernement libéral règle son dossier peut prendre du temps, ce qui demeure pour eux inquiétant. Pour aller plus vite, il s’agit pour ces derniers de repartir sous un autre nom. Ç’a été la stratégie adoptée par Genivar qui s’appelle désormais WSP Canada.

Jadis, Genivar pilotait un système de fausse facturation. Plusieurs de ses employés ont été accusés de collusion ces dernières années.  François Perreault par exemple. Et la firme elle-même a été accusée de financement politique illégal. Cela aurait dû être suffisant pour qu’elle disparaisse pour de bon de nos écrans radar.

Hé bien non. En changeant de nom, la firme est parvenue à éviter le pire. Et les affaires prospèrent depuis comme avant. On vient d’ailleurs d’apprendre, via communiqué, que c’est WSP Canada qui a obtenu le contrat pour la construction des pipelines sur Anticosti! http://bit.ly/1RgFMN0

Et que dire de SNC-Lavalin? Coupable d’avoir magouillé avec des régimes coupe-gorge, de fraude et de malversation (entre autres dans le dossier CUSM-Arthur Porter), on croyait la compagnie vouée à la faillite, parce qu’il était difficile d’imaginer qu’elle pourrait un jour redresser sa réputation et obtenir à nouveau des contrats importants. Après tout, qui aurait envie de confier ses contrats à une telle compagnie? Aucune personne normale en tout cas.

Mais ces compagnies-là ont des amis bien placés, ce qui leur permet de survivre à tout.

Ce qui explique que c’est SNC-Lavalin qui a obtenu le contrat du fédéral de plusieurs milliards pour la construction du nouveau pont Champlain.

Y’a pas à dire. Le crime paie. Mais seulement pour  les amis du régime.

Pour les gens ordinaires, ben y’a l’austérité et rien d’autre.

Pis ça écoeure!

J’aurais envie de crier fuck toute! Mais pas mal plus fuck le régime corrompu qui s’appelle Québec-contrôlé-par-les-Canadiens!