Dans de telles circonstances, à défaut de prendre la parole parce qu’ils en ont vraiment envie, les citoyens doivent le faire par devoir, parce qu’on ne peut laisser les choses empirer encore davantage. À ce chapitre, je tiens à saluer bien bas l’implication de Christian Vanasse (membre des Zapartistes et conseiller municipal de Saint-Jude) et Dominic Champagne (metteur en scène) dans le dossier des gaz de schiste. Je ne sais pas si vous avez écouté l’émission Les Francs tireurs cette semaine, mais celle-ci valait vraiment le détour. Les deux bonshommes ont défendu avec brio le discours des citoyens en faveur d’un moratoire sur l’exploration et l’exploitation de cette ressource qui, quoi qu’en pensent les dilapideurs de richesses québécoises, nous appartient.
Profondément choquant était d’entendre Vanasse raconter comment ces compagnies se comportent chez nous, eu égard aux gens qui habitent le pays. Il y a eu un glissement de terrain à Saint-Jude au cours des derniers mois. Des personnes ont perdu la vie à cause de cela. Mais cela n’a pas empêché une company canadian de se foutre des avis municipaux qui indiquaient qu’il fallait se tenir loin du secteur car le sol y était imprévisible. La company a tout d’abord garanti qu’elle n’y utiliserait pas de dynamite. Mensonge, puisqu’elle l’a fait. Cela a effrayé des gens qui n’avaient absolument pas besoin de ça, dont le frère d’une des victimes. Et personne ne pouvait rien pour les empêcher car le sous-sol est sous le contrôle de ceux qui possèdent les claims (les droits d’exploitation accordés par Québec). Le Québec, c’est un far-west nouveau genre et ce sont ces mêmes foutues compagnies qui font la loi. On est dans de beaux draps!
Comprenez bien ce dont il est ici question : des spéculateurs, des opportunistes, des capitalistes sans scrupules peuvent débarquer demain matin dans votre cour pour y faire des trous afin d’analyser les richesses qui se trouvent sous votre maison, et vous n’y pouvez rien. Rien, niet, nada… Alors fermez votre grande gueule de chiâleux qui nuit aux intérêts de la company. C’tu assez clair?
Sans l’ombre d’un doute, nous sommes revenus au bon vieux temps du capitalisme sauvage. Et dans ce système que Michel Chartrand disait être « le désordre », les citoyens ne représentent absolument rien en comparaison du fric que le grand capital peut empocher, lui qui couche dans le même lit que le politique.
Cela me fait d’ailleurs penser à un article que j’avais écrit dans Le Québécois il y a quelques années de cela. J’y dénonçais les cadeaux que le gouvernement Charest faisait aux compagnies qui espéraient découvrir du gaz naturel ou du pétrole dans le Saint-Laurent. Il était principalement question de Junex et de Gastem. Pour leur faciliter la tâche, Hydro-Québec (là où on retrouve bien des amis à Charest, comme c’est étonnant) leur avait fait cadeau des permis d’exploitation concernant ces ressources sur l’île d’Anticosti, notamment. Je me demandais comment il se faisait que de telles compagnies bénéficiaient d’autant de traitements de faveur de la part des libéraux. J’ai alors commencé à analyser l’affaire en fonction de la nébuleuse; la maudite nébuleuse. Et j’avais bien raison de le faire.
J’avais ainsi pu souligner, avant tout le monde soit-dit en passant, s’agit de consulter les vieux numéros du Québécois pour en avoir la preuve, que la compagnie Gastem est présidée par Raymond Savoie, ancien ministre libéral (et entre autres délégué aux mines SVP). Du côté de Junex, ce n’est guère mieux puisque André Caillé, président de l’Association pétrolière et gazière du Québec, siège sur le conseil d’administration de la compagnie. Un beau monde de crottés que tout ça !
Lors de cette même émission diffusée sur les ondes de Télé-Québec, un prof d’université (donc tout à fait sérieux puisqu’on sait très bien qu’il n’y a que des gens sérieux dans les universités…) qui a étudié le dossier et écrit un livre sur le sujet a très bien dit ce dont tout le monde se doutait : en matière d’exploitation des ressources naturelles, le Québec est à peu près le pire exemple à suivre au monde. Le nom du prof ? Normand Mousseau. Le titre du livre? La révolution des gaz de schiste. À lire…
La loi sur les mines qui date de la fin du XIXe siècle est un vrai torchon, un ramassis d’inepties qui permet aux compagnies de rouleau-compresser les pauvres cons que nous sommes. Ces salopards font de l’argent en exploitant nos ressources naturelles, et notre gouvernement est trop ti-coune (ou trop complice) pour réclamer des redevances dignes de ce nom. Notre gouvernement donne sans coup férir notre pays aux compagnies d’ici et d’ailleurs, mais d’ailleurs surtout; presque seulement d’ailleurs en fait. Autrement dit, le Québec, c’est le paradis des fouteurs d’éoliennes dans votre jardin, des empoisonneurs de nappes phréatiques, des raseurs de forêts et des foreurs de fonds marins. Une honte que tout cela.
Si le Parti Québécois a conservé ne serait qu’une once de dignité, il s’engagera dans les plus brefs délais à faire ce qui doit être fait : c’est-à-dire scrapper cette satanée loi sur les mines pour en imposer une nouvelle qui affichera en haut de son libellé une formule spécifiant que les ressources naturelles appartiennent aux Québécois et qu’il ne saurait être question que des compagnies leur volent en toute impunité, le sourire dans la face. Si ce PQ était encore courageux, il développerait en plus une stratégie destinée à nationaliser enfin nos ressources naturelles. Mais on peut toujours rêver…
Du sale puits de schiste, tournons-nous maintenant vers le puits sans fond à conneries, et je parle de Jean Charest. Il fallait le voir cette semaine faire l’arrogant sur les ondes et dans les pages des médias. Cette tête à claques le criait haut et fort : le rapport Bastarache lavait sa réputation plus blanc que blanc. Bellemare aurait menti sur toute la ligne. Il n’y aurait aucun problème avec les nominations des juges au Québec. Fallait le croire puisque son pote-juge-militant-mercenaire, Michel Bastarache, le disait lui aussi !
Faut vraiment prendre les gens pour les derniers des imbéciles pour dire de telles âneries publiquement. Charest a organisé tout ce show avec le gars des vues, il a nommé un juge politique à la tête de sa commission bidon, et il tente en fin de course de nous faire croire que toute cette mascarade est convaincante ! La politique au Québec, c’est aussi arrangé que ne l’était la lutte quand elle était encore populaire. Tout comme les lutteurs, au nom du spectacle, tentaient de nous faire croire que les coups qu’ils échangeaient lors des combats diffusés sur les ondes de Télé-métropole le dimanche matin faisaient vraiment mal et que le vainqueur du combat n’était pas connu d’avance, tout comme Charest voudrait aujourd’hui nous faire croire que la commission Bastarache était une vraie commission, pas arrangée du tout; il voudrait aussi qu’on le croit quand il dit qu’on n’a pas à s’inquiéter de ce qui se passe dans les coulisses des ministères et des tribunaux. Le malheur pour lui, c’est qu’on n’est pas né de la dernière pluie.
Mais il y a quand même un tout petit peu de justice en ce bas monde, il faut bien le dire. Comme tous les menteurs, Charest finit lui aussi par s’enfarger dans ses menteries, par perdre le fil et laisser ainsi filtrer un peu de vérité pour celui qui veut vraiment la voir (ça, ça veut dire quelqu’un d’autre qu’Alain Dubuc…). Il a beau nous assurer que tout va bien madame la marquise, il a beau faire la danse du spare rib en criant que Bastarache ne le blâme pour rien pantoute, le fait est quand même que le rapport, lui, dit que le sysème des nominations des juges est perméable aux pressions politiques de toutes sortes. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’involontairement, Charest et Bastarache nous disent que tout ce que dit Bellemare – et même plus – est possible. Ils ajoutent bien sûr – et fort malhonnêtement – que cela n’est heureusement pas arrivé. Mais toute personne ayant réfléchi un tant soit peu à la question et connaissant le moindrement le monde politique ne les croit pas. Fava, Rondeau et tous les crosseurs qui gravitent autour du PLQ, ou qui y militent, avaient entre les mains une occasion en or pour graisser la patte des amis du régime…mais ils ne l’auraient pas fait. C’est Charest et Bastarache qui le jurent. Qui voudrait les croire? Ceux qui jugent qu’il n’y a que la vérité qui sort de la bouche des politiciens et des juges-militants j’imagine…
Mieux vaut entendre ça que d’être sourd. Mais étrangement, des fois, j’aimerais quand même mieux être sourd.