La gestion pro-entreprise de l’État non contestée par Québec solidaire
La maxi-crise de la pandémie se décline en ce moment (3 avril) en deux mini-crises, celle des paiements de fin de mois et celle du manque criant de produits sanitaires. À ces deux mini-crises, il y des réponses néolibérales et anticapitalistes. Celle néolibérale des gouvernements, qui ne sont pas au Québec et au Canada, réactionnaires comme la présidence étasunienne tendant à nier ou minimiser la réalité, est d’appeler au bon vouloir et à la bonne conscience des banques, des propriétaires-locateurs grands et petits pour accorder des délais cas par cas aux ménages populaires incapables de boucler les fins de moi.
Pour le matériel sanitaire, la politique néolibérale est d’abord de se fier aux importations, alors que le réflexe chacun pour soi est généralisé mondialement et même entre les provinces et entre les régions du Québec au détriment des plus affectées, ensuite de prier et supplier les entreprises nationales grandes et petites d’en produire. On ne rabroue même pas une quincaillerie qui vend au grand public les rares masques N95.
La réponse anticapitaliste est d’obliger les banques et grands propriétaires immobiliers (et Hydro-Québec) à annuler les paiements de fins de mois (et les frais d’intérêt sur les cartes de crédit) durant la pandémie au profit des ménages, des petits propriétaires-locateurs s’ils annulent les loyers, et des commerces menacés de banqueroutes. Pour le matériel sanitaire, cette réponse est d’instaurer une réquisition et une planification sommaire d’application obligatoire sous peine d’expropriation stipulant quantités, délais, prix et destinataires.
Québec solidaire, replié sur le parti parlementaire, accepte la priorité de sauver les banques
Pour ce faire, face à des gouvernements récalcitrants, il faut d’abord et avant tout un discours clair de Québec solidaire qui est aux abonnés absents sauf pour une ridicule demande afin de sauver la face. Devant la panique populaire face au vide de revenu entre la perte de revenu d’emploi et l’arrivée du premier chèque du PCU ou de l’assurance-emploi dans les deux dernières semaines d’avril, il propose d’abord de boucher le trou par deux chèques de 1000$ chacun les 1er et 15 avril par Québec… chèques qui n’ont aucune raison d’arriver plus vite pour boucler les paiements d’hypothèques, de services publics et de loyer. Deuxième essai : il propose un délai de 30 jours pour le loyer mais qui doit être payé ou un congé d’intérêt de 30 jours pour les hypothèques tout en proposant de se fier au bon vouloir des banques pour le paiement du principal. (En passant on se demande pourquoi le parti considère que les propriétaires auraient droit à une baisse et non les locataires.)
La proposition Solidaire signifie le fardeau d’une dette supplémentaire en temps de baisse de revenu (75% du salaire ou 2000$ par mois plus le vide de la fin mars) alors que selon l’éditorialiste du Devoir « [l]a presse à billets roule à fond [et qu’] Ottawa devrait être beaucoup plus exigeant à l’endroit des banques. » Quand on analyse les plans financiers des gouvernements pour répondre à la pandémie, on réalise que sans attendre le bilan, ils commencent déjà à faire payer le peuple travailleur tout en ouvrant les vannes à coups de billions $ pour soutenir le capital financier et même embrigader le patronat comme gestionnaire des aumônes au peuple travailleur tout en oubliant les sans travail pré-pandémie et encore plus les sans abri, les personnes réfugiées condamnées à des jeûnes de protestation dans leur prison à Laval et les autochtones isolés et entassés sans aide digne de ce nom dans leurs réserves ou dans les rues de Montréal. (L’Empire contre-attaque : l’économie d’abord, la santé publique ensuite, Presse-toi-à-gauche, 31/03/20)
L’absence d’une réponse de gauche de la part des Solidaires nuit aux tentatives de mobilisations syndicales et communautaires dont certaines PME, par exemple ce mouvement pour une grève de loyer que Québec solidaire n’a pas soutenu, nécessaires pour contraindre le capital de la finance et de l’immobilier à annuler les paiements de fin de mois et pour obliger celui de la fabrication et de la vente à faire l’inventaire du matériel indispensable nécessaire tout en mettant en action les facilités productives quitte à contraindre le patron à en faire la conversion. Ainsi serait mis en place les prémisses économiques et politiques d’une planification démocratique de société de « prendre soin » opposée au retour au statu quo que préparent CAQ et Libéraux fédéraux à coups de pipelines, de champs pétroliers arctiques et de troisième lien.
Voilà ce que donne la liquidation de la démocratie interne au point même d’écarter le Comité de coordination nationale et la Commission politique au profit de la petite dictature du parti parlementaire. Car le parti est maintenant dirigé par un groupe ad hoc composé des député-e-s et de salarié-e-s se contentant de réagir à la petite semaine sans plan d’ensemble s’inspirant d’une société pro-climat de prendre soin.