Pourquoi j’appuie Option nationale

Je commençai par répondre en marchant sur des œufs. Beaucoup d’œufs. Des douzaines même. La dernière chose que je voulais, c’était de créer une polémique qui aurait pu nuire à M. Aussant. Mais je finis tout de même, après maintes contorsions discursives, par lâcher le morceau. Grande gueule que je suis va! Oui, donc, j’appuierai Option nationale.

Il faut dire que le journaliste avait déjà parlé à M. Aussant avant que l’on discute ensemble au téléphone et le chef d’Option nationale se sentait tout à fait à l’aise avec le courant plus « pur et dur » du mouvement indépendantiste. Cela facilita, il faut bien le dire, ma confession qui tomba de ce fait dans l’oreille de Quebecor.

Il n’en fallait pas plus pour que des militants m’écrivent. Certains étaient heureux de ma prise de position. D’autres moins. Certains m’insultèrent, m’accusant d’être un suppôt du multiculturalisme à tous crins…Non mais, qu’est-ce certains ne diraient pas pour se rendre intéressants…Mais bof, c’est un peu toujours comme ça que ça se passe en pareilles circonstances, l’unanimité n’étant certes point de ce monde.

Peu importe, je profite de l’occasion pour expliquer plus en détail pourquoi je suis un fervent partisan d’Option nationale.

Je le suis tout d’abord pour l’homme à l’origine du parti. Je ne connais pas personnellement Jean-Martin Aussant. En fait, je ne l’ai même jamais rencontré. Mais la liberté dont il a fait preuve le printemps dernier en osant dire tout haut, lorsqu’il a claqué la porte, ce que bien des militants pensent, c’est-à-dire que le PQ de Pauline Marois n’agit qu’en termes électoraux et qu’il préfère le pouvoir au pays, m’a plu au plus haut point. Le bonhomme a fait la preuve qu’il a du culot, qu’il est capable d’audace, de témérité même. Car il faut bien le dire : créer un nouveau parti politique comme il se propose de le faire, un parti clairement et résolument indépendantiste en plus, n’est pas donné à tous ; ça prend une certaine dose de folie pour se lancer là-dedans. Ça prend en tout cas du courage, et beaucoup, pour risquer pareille aventure. Et du courage, du culot, de l’audace, il en faudra une tonne pour le mettre au monde ce pays du Québec, nous en sommes tous déjà conscients.

Courageux était d’annoncer du même souffle qu’Option nationale serait en faveur de gestes de rupture, d’une déclaration unilatérale d’indépendance et de la nationalisation des ressources naturelles. On s’entend qu’un tel programme mobilisera des ennemis puissants et bien nantis. Mais Aussant a confiance en ses idées et il est prêt à les défendre vigoureusement, seule façon de parvenir à ses fins : la libération du Québec. C’est fichtrement beau à voir !

Mais ça va prendre également beaucoup d’intelligence pour atteindre pareils objectifs. Et à ce chapitre également, Aussant est loin d’être dépourvu. Jeune intellectuel, économiste de formation qu’on osa même comparer à Monsieur – c’est dire s’il a du talent celui-là – Jean-Martin Aussant a toutes les qualités requises pour donner beaucoup de crédibilité à l’indépendantisme québécois qui doit, encore en 2011, subir les assauts incessants d’une presse servile et mercenaire, toujours mue par des lignes éditoriales qui sont profondément entachées par l’unitarisme canadien, desservant de ce fait la démocratie comme on prétend la vivre ici.

Je trouve également intéressant le fait que Aussant n’est pas un vieux de la vieille. En politique québécoise, on voit les mêmes maudites têtes depuis des décennies. J’aime qu’Aussant n’ait pas été élu une première fois en 1976 ou en 1981. Une nouvelle façon de combattre pour le pays, voilà ce qu’Aussant peut apporter. Et il est en train de le faire.

En tout cas, ce n’est certes pas le ronronnant PQ qui ne travaille à peu près jamais à l’avancement du projet qui est le mieux placé pour donner des leçons aux indépendantistes en général et à Option nationale en particulier ! J’écoutais, l’autre jour, la sortie du doyen de l’Assemblée nationale, François Gendron. Celui-là en appelait à l’unité des troupes. Afin de ridiculiser la démarche de Aussant, il se permit de comparer son parti à une chaloupe et le PQ au navire principal. Je ferais remarquer à M. Gendron qu’en certaines circonstances, il vaut mieux être dans la chaloupe qu’ailleurs. En 1911, aurait-il préféré être encore sur le pont du Titanic lorsque celui-ci sombrait dans les eaux glaciales de Terre-Neuve ou dans un des canots de sauvetage qui quittaient les lieux et qui permirent une suite à la vie de leurs occupants, une façon pour eux d’envisager l’avenir malgré le drame affreux qui se jouait sous leurs yeux? En tout cas, moi, je sais où j’aurais voulu être.

Actuellement, le PQ est ce Titanic qui s’en va droit dans le mur. Il multiplie les conneries (l’exemple le plus flagrant est cet appui débile au projet d’amphithéâtre du petit maire Red Bull) qui portent ombrage au projet de pays. Et son plan souverainiste laisse plus qu’à désirer. Il n’existe pratiquement pas. L’oisiveté des dernières années a donné une récolte abondante : que du vide. Un méchant coup de barre doit être donné pour que le PQ retrouve sa crédibilité indépendantiste, mais le capitaine s’y refuse. Dans un tel cas, il nous faut envisager la lutte autrement, mais surtout, ailleurs.

François Gendron n’est pas le seul à dénoncer la division des forces en analysant la démarche d’Aussant, plusieurs militants en font de même, et jusqu’à un certain point, je les comprends. Préférable aurait été que le PQ demeure ce qu’il a été sous Parizeau. Mais nous devons constater aujourd’hui que tel n’est absolument pas le cas. Pour le bien du pays que nous chérissons, il nous faut donc agir. Et Aussant agit, à sa façon. Et sa façon, je la respecte au plus haut point.

Cela me rappelle d’ailleurs mon dernier voyage en Catalogne, en septembre 2010. Je prononçai un discours à Arenys de Munt. Tout juste après moi, des sages de l’indépendantisme catalan prirent la parole. Ils en profitèrent pour servir une volée de bois vert à Joan Laporta, le grand patron du club de foot El Barça qui s’apprêtait à l’époque à créer son propre parti résolument indépendantiste (ce qu’il a fait depuis). Les sages lui reprochaient de ne pas faire front commun à l’intérieur même d’Esquerra Republicana de Catalunya, un parti modérément souverainiste. Les mêmes arguments étaient utilisés contre Laporta que ceux qu’on entend ces jours-ci au Québec et qui sont dirigés contre Aussant.

La réaction était prévisible. Mais la réaction ne fait pas le pays. L’action, oui!

Aux tenants de l’unité à tout prix, je réponds bien simplement qu’il vaut mieux que les différentes tendances du mouvement indépendantiste possèdent chacune leur véhicule politique plutôt qu’elles demeurent toutes à l’intérieur du même parti pour mieux s’y entredéchirer (comme cela a été trop longtemps le cas au PQ). Il s’agit simplement que les différents partis qui militent plus ou moins énergiquement pour le pays du Québec comprennent bien que le véritable ennemi n’est pas celui qui entrevoit la stratégie indépendantiste différemment de soi mais bien celui qui combat le pays à naître. Ça, c’est très important, il ne faut pas passer notre temps à nous battre entre nous, cela serait très contre-productif. Il faut garder à l’esprit qu’un jour ou l’autre, nous devrons tous nous retrouver du même côté de la barricade, même si nous sommes tous séparés dans nos propres partis : Option nationale, QS et le PQ. Voilà le plus grand défi qui nous attend. Mais je sais qu’on peut le relever.

J’endosse également Option nationale car je crois que le projet indépendantiste se doit d’être vraiment représenté efficacement et intelligemment sur la scène politique québécoise. Tous seront d’accord pour dire qu’il aurait été préférable que le PQ mène cette mission, toujours, avec brio. Mais ce n’est décidément pas le cas. D’autres doivent donc s’en charger. Et personne n’est actuellement mieux placé que Jean-Martin Aussant pour le faire, dans la transparence, l’honnêteté et le courage.

En tant qu’indépendantiste, je n’ai jamais cru que c’était une stratégie respectable que celle qui consiste à dissimuler notre projet afin de ne pas « effrayer les gens ». Comme le disait Pierre Bourgault dans un célèbre discours prononcé en 1971 : « Je pense que nous avons le devoir de ne rien cacher à la population de ce que nous croyons nécessaire et vrai ». À l’évidence, le PQ n’a jamais compris le message que Bourgault tenta de lui transmettre il y a quarante ans de cela maintenant. Admettons-le, ça commence à ressembler à un parti dur de comprenure ! Allons-nous passer les quarante prochaines années à tenter de lui faire enfin entendre raison ? Nous n’avons tout simplement pas le temps d’agir de la sorte.

Par contre, qui peut prétendre qu’Aussant n’exprime pas très clairement ses idées, ses positions? Personne. Voilà déjà une méchante rupture avec le PQ moumoune qui cache toujours ses idées pour mieux se faire élire. Une bouffée d’air frais qui me plaît au plus haut point!

Tout ça me rappelle une rencontre que nous avons eue avec des indépendantistes de renom. C’était en 2007. On cherchait une solution à la catastrophe appelée André Boisclair, celui-là même qui aujourd’hui raconte des histoires à dormir debout pour mieux nous vendre, au nom de grandes entreprises étrangères, les perfides gaz de schiste. À l’époque, déjà, je voyais bien que le problème péquiste était très profond, pratiquement insoluble. Mais à part quelques autres, personne ne croyait à la mise sur pied d’un nouveau parti. Je me rappelle avoir dit à Falardeau qu’un jour ou l’autre, on ne pourrait plus remettre le règlement de ce problème au lendemain. Et Jean-Martin Aussant est là, aujourd’hui, bien décidé à faire plus que sa part pour donner une « suite à notre monde ». Une partie de la solution au problème péquiste, il l’a propose aujourd’hui. Pour cela, je l’en remercie fraternellement.

Mais je ne dis pas que ça sera facile pour M. Aussant! Demain matin, le gouvernement, il ne formera pas. Plus sérieux est d’envisager pareille démarche en termes de coalition. Tout un défi, quoi! Mais y’a-t-il déjà eu quelque chose de facile dans notre vécu national ? Non, jamais. Nous sommes arrivés sur ce coin du monde en des temps où l’on croyait les épinettes infinies. Isolés, coupés du monde, nous avons dû nous débrouiller. « À force de courage », nous avons construit un pays. On nous l’a certes volé, drame immense. À l’occasion, on l’a défendu au bout du fusil, ce pays qu’on espérait récupérer. Les tuques furent écrasées et pendues. Mais malgré tout, notre pays endormi demeure bien vivant dans nos cœurs. Il n’attend que le meilleur moment pour réapparaître, pour reprendre racine à la face du monde. Et je demeure convaincu qu’Option nationale accélérera notre marche en avant, vers ce noble objectif. Voilà pourquoi j’appuie ce parti.

p.s. Cet appui à Option nationale m’est personnel. Le Réseau, lui, demeure libre de toute attache partisane. Nos militants sont libres de voter pour le parti de leur choix, tant qu’il s’agit d’un parti qui est en faveur du pays du Québec.

 

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