Martin Cauchon, nouveau magnat de la presse

Le groupe Gesca appartenant à la famille Desmarais annonce aujourd’hui qu’il se départit de tous ses journaux, hormis La Presse. Le Soleil, Le Droit, Le Nouvelliste, Le Quotidien, La Tribune, La Voix de l’Est de même que Progrès Dimanche passent de ce fait aux mains de Capitales Médias.

Le Groupe Capitales Médias a été créé en mars 2015. Le seul actionnaire connu du groupe est l’ex-ministre libéral fédéral Martin Cauchon.

La nouvelle a de quoi étonner. Non pas qu’on puisse se surprendre qu’un groupe de presse se départisse de ses journaux. Connaissant les difficultés que rencontre la presse écrite dans le contexte actuel, il est clair qu’il sera de plus en plus difficile dans les années à venir de rentabiliser la production de journaux imprimés. S’en débarrasser demeure donc une option logique.

Ce qui étonne dans le cas présent, c’est qu’un simple avocat, un simple ex-député et ex-ministre libéral comme Martin Cauchon soit publiquement présenté comme le seul acheteur de ces sept journaux. On veut bien croire qu’il gagne fort bien sa vie celui-là en tant que rentier du parlement fédéral et avocat d’un gros cabinet de Montréal, mais de là à pouvoir jouer les barons des médias, il y a quand même une marge que son portefeuille ne devrait pas lui permettre de franchir.

On ne connaît pas encore la valeur de la transaction dont on parle ici. Mais considérant qu’il s’agit de la vente de sept journaux, il est assurément question de gros sous. Pour mieux l’imaginer, il s’agit de faire un bond dans le passé.

Dans le seul cas du journal Le Soleil, celui-ci avait été vendu en 1974 par les frères Guy et Gabriel Gilbert à Unimédia pour un montant de huit millions$. En 1987, c’est Conrad Black qui mit la main sur Unimédia et donc sur Le Soleil. Il prit du même coup possession du journal Le Quotidien qui appartenait aussi à Unimédia. Le coût de la transaction? 91 millions$ Le Soleil, Le Droit (que possédait déjà Conrad Black avant qu’il n’achetasse Unimédia) et Le Quotidien seront finalement revendus, en 2000, au groupe Power Corporation cette fois. Cette dernière entreprise a tenté de garder le montant de la transaction secret. Mais les experts estiment que les journaux lui ont été vendus en échange d’une somme avoisinant les 125 ou 150 millions$

Aujourd’hui, malgré la crise que traverse la presse écrite, combien valent les journaux de Gesca? Même si Power Corporation a toujours multiplié les manoeuvres afin de dissimuler la rentabilité avérée ou pas de sa filiale Gesca, Yves Michaud en sait quelque chose, il est évident que le montant de la vente d’aujourd’hui surpasse le pouvoir d’achat du seul homme qu’est Martin Cauchon.

Alors qui a appuyé Martin Cauchon dans sa démarche?  Qui est derrière le Groupe Capitales médias? Et pourquoi ne pas les avoir présentés aujourd’hui, au moment de l’annonce de la transaction?  Voilà de bonnes questions à nous poser.

Pour nous aider dans notre réflexion, rappelons que Power Corporation a souvent facilité la tâche d’hommes que la famille Desmarais considérait comme des alliés politiques. Si Paul Martin est devenu riche, c’est beaucoup grâce aux Desmarais qui lui ont vendu à rabais la Canada Steamship Lines. Jean Chrétien et Daniel Johnson fils ont également été conçus dans la cuisse de Power Corporation. La fille de Chrétien est même mariée à André Desmarais, fils de Paul père. Le dernier cas en lice serait-il Martin Cauchon?

Ancien lieutenant-politique de Jean Chrétien qui était en guerre ouverte contre Paul Martin, Cauchon s’était finalement décidé à abandonner son siège de député libéral lorsque ce même Paul Martin devint chef du PLC en 2004. Il reprit alors la robe d’avocat. En 2006, Cauchon avait songé longuement à se porter candidat à la course à la chefferie du PLC. Il avait finalement abandonné l’idée, se contentant d’appuyer Bob Rae. Il tentera un retour en 2011 au parlement d’Ottawa sous les couleurs du PLC bien sûr, mais sera battu, dans Outremont, par le chef néo-démocrate, Thomas Mulcair. En 2013, Cauchon participera à la course à la chefferie du PLC, mais sera battu par Justin Trudeau.

En tant qu’avocat chez Heenan Blaikie, Cauchon a entre autres défendu et vendu le Plan Nord des libéraux provinciaux.

Alors qu’il agissait à titre de lieutenant-politique de Jean Chrétien, Martin Cauchon était un chaud partisan du programme des commandites qui donna naissance au scandale que l’on connaît et à la commission Gomery. Cette commission prouva que les amis du régime libéral, dont Jean Lafleur qui était un ami personnel de Cauchon, s’étaient frauduleusement remplis les poches avec ce programme destiné à enfoncer dans la gorge des Québécois ce Canada qu’ils avaient manqué quitter lors du référendum volé de 1995.

Martin Cauchon était également à la tête du cabinet Chrétien lorsque l’inique loi sur la clarté référendaire a été rédigée. Cette loi fédérale et antidémocratique qui se propose d’encadrer la démarche souverainiste que pourraient de nouveau entamer un jour les Québécois a été adoptée en 2000.

Considérant les accointances de Martin Cauchon avec le gang libéral, et considérant que les journaux en question appartenaient jusque-là au clan Desmarais qui soutient ce même gang depuis toujours, il n’est pas tellement étonnant que les journaux vendus aujourd’hui aient abouti entre les mains de celui que l’on connaît.  Reste maintenant à savoir qui sont ceux qui l’ont aidé à réaliser ce coup d’éclat.

Qui vivra verra comme on dit.

Publié le à la une, chroniques politique québécoise, Journal Le Québécois, Organisation du Québécois et étiqueté , , , .

2 commentaires

  1. Je retiens surtout ceci : Alors qu’il agissait à titre de lieutenant-politique de Jean Chrétien, Martin Cauchon était un chaud partisan du programme des commandites qui donna naissance au scandale que l’on connaît et à la commission Gomery…

  2. Pingback: La frayeur libérale | independantes.quebec

Comments are closed.