Il y a dix ans maintenant, cet homme a été traîné dans la boue pour des raisons qui ont été inventées de toutes pièces par ses adversaires politiques. On lui a mis des mots antisémites dans la bouche, mots qu’il n’a JAMAIS prononcés. Pour le punir, le gouvernement du péquiste Lucien Bouchard s’est entendu avec l’opposition officielle du retors Jean Charest pour adopter une motion de blâme à l’Assemblée nationale. On lui reprochait ses dires à l’égard de la communauté juive. Les 109 députés présents à l’Assemblée nationale ce jour-là se sont levés en bloc pour adopter la motion de blâme; seul le député Jean-Claude St-André quitta la salle.
Or, les députés ne savaient absolument pas de quoi il s’agissait. Ils n’avaient pas pris connaissance des propos d’Yves Michaud. Ils l’ont condamné parce que leurs cheufs l’exigeaient, tout simplement. Ils n’ont jamais même posé de questions par rapport aux propos qu’on reprochait au Robin des banques. Ils n’ont pas davantage demandé à l’entendre. Ils ont ainsi adopté une motion qui reposait sur des faussetés, des mensonges, de la pure calomnie ; tout ça parce que Lucien Bouchard voulait se débarrasser de Michaud qui espérait devenir candidat dans Mercier et parce que les libéraux étaient trop heureux d’avoir l’occasion de salir à nouveau le mouvement indépendantiste en le faisant passer pour raciste. Et c’est ainsi qu’un homme des plus respectables a été sacrifié sur l’autel de la saloperie politique. Une écoeuranterie que tout ça.
Dans un monde normal (mais le Québec est tout sauf normal), la réputation d’Yves Michaud aurait été lavée dès qu’il aurait été évident pour tous qu’il n’avait jamais prononcé de discours antisémite. Normalement, quelques jours auraient dû suffire pour fermer ce dossier. Mais c’est plutôt l’inverse qui s’est produit. Les menteurs se sont enfoncés dans le mensonge, les écoeurants dans l’écoeuranterie. Résultat : 10 ans plus tard, Yves Michaud, un honnête citoyen, un homme qui a fait beaucoup pour le Québec, traîne toujours ce boulet, vit toujours avec l’opprobre qui a été malhonnêtement dirigé contre lui. À l’orée de ses 80 ans, il doit encore se lever à chaque matin en pensant à cette sordide affaire. Il est mauditement temps d’en finir avec ça !
Pourtant, Yves Michaud ne demande pas grand chose. Il demande simplement que ceux qui l’ont condamné à l’époque s’excusent ; ceux de sa famille politique s’entend. Plusieurs l’ont déjà fait, et c’est tout à leur honneur. Mais pas tous. Michaud veut aussi que le PQ s’engage à changer les règles de fonctionnement de l’Assemblée nationale pour que plus jamais un citoyen ne soit ainsi victime d’un infâme tribunal d’inquisition.
Pauline Marois a ENFIN fait un geste en ce sens, demandant au président de l’Assemblée nationale, Yvon Vallières, de proposer aux députés un mécanisme permettant aux personnes visées par une motion de blâme de se faire à tout le moins entendre avant d’être condamnées. C’est un geste tout à fait guimauve que celui-là, bien sûr. Préférable aurait été que le PQ s’engageasse à imposer envers et contre tous un tel mécanisme lorsqu’il reprendra le pouvoir – et plus complet que celui proposé par Pauline au président Vallières –, sans demander aux libéraux leur avis. Mais c’est quand même mieux que rien.
C’est en tout cas beaucoup mieux que l’attitude adoptée par la députation péquiste par rapport à la motion présentée hier par Amir Khadir à l’Assemblée nationale pour réhabiliter Yves Michaud. Le Parti Québécois a tout simplement refusé de débattre la motion du député de Québec solidaire.
Je sais, les libéraux espéraient tendre un piège au PQ avec cette motion. Ils espéraient le déstabiliser en l’entraînant malhonnêtement sur le terrain du nationalisme ethnique. C’est d’ailleurs ce que les propos prononcés hier par le ti-clin qu’est Jean-Marc Fournier, leader des liberrrââls, confirmaient. Mais les libéraux, ce sont des salauds. Il fallait s’attendre à ce qu’ils agissent ainsi. Et s’ils ne nous salissent pas à l’Assemblée nationale, ils le feront ailleurs. Tenter de faire croire que les indépendantistes sont des nazis, c’est leur marque de commerce, à eux et aux journaux qui les promeuvent au quotidien. On connaît la musique. Alors, les libéraux, on s’en fout.
Hier, ce n’était pas le temps de faire de la petite politique partisane, ce n’était pas le temps d’agir en fonction du jeu parlementaire. Le groupe de Pauline Marois aurait dû profiter de l’occasion pour se lever tout aussi en bloc que les péquistes ne l’avaient fait le 14 décembre 2000 pour s’excuser auprès d’Yves Michaud. C’est ça que l’honneur exigeait d’eux hier. Il est inconcevable qu’on laisse un individu aux prises avec des faussetés, des mensonges, et ce, des années durant; il est scandaleux qu’on ne fasse pas tout pour rétablir enfin la vérité dans ce dossier. Hier, il était temps de le faire, de dire qu’Yves Michaud est un grand citoyen, nullement antisémite. Hier, il fallait profiter de l’occasion pour dire aussi qu’une telle chose ne surviendra jamais lors d’un prochain règne péquiste, et ce, parce que les règles de l’Assemblée nationale seront changées, unilatéralement s’il le faut.
Hier, il fallait se contrefoutre de ce que les corrompus de libéraux pouvaient avoir à dire. Il fallait les laisser déblatérer leurs mensonges et leurs saloperies ; on devait tout simplement ignorer les indignes collabos qu’ils sont. Mais ce n’est pas ce que le PQ de Pauline Marois a décidé de faire. En refusant d’agir de la sorte, la cheffe a ouvert à nouveau des plaies qui commençaient tout juste à se cicatriser – un peu – dans le mouvement indépendantiste.
Mais il est vrai qu’il y a encore des individus dans le PQ qui mènent cabale contre Yves Michaud. Pour quelles raisons ? Bien difficile à dire. Par vengeance personnelle ? Pour ne pas perdre la face ? Pour faire encore une fois une job de bras à un pur et dur ? Sûrement un peu de tout ça. Et plus encore même.
Les échos qui nous proviennent de l’intérieur du PQ nous disent que le député Sylvain Simard mènerait la fronde. Il a joué un rôle déterminant dans l’écoeurante affaire Michaud en 2000, et il persiste encore aujourd’hui à salir la réputation d’un homme beaucoup plus respectable que lui. L’olibrius (comme l’avait justement rebaptisé M. Michaud) est-il seul responsable de tout ce cirque de mauvais goût qui ne cesse de s’étirer dans le temps? Est-ce que cet homme seul est assez influent pour imposer ses idées à tout le caucus péquiste ? Bien sûr que non. Simard est un faible, et à lui seul, il ne peut rien contre Michaud. Il y a donc des députés qui jouent un double-rôle dans cette affaire, qui portent des masques, qui n’ont pas le courage de diffamer encore et encore Yves Michaud sur la place publique, mais qui le font en coulisses. Mais qui sont-ils ? Bonne question.
Et pas sûr que ce ne soient que des députés qui manigancent contre Michaud ; des apparatchiks pourraient tout aussi bien le faire. En fait, il est presque sûr qu’il en va ainsi.
Si l’on se rapporte à l’origine de l’affaire, nous savons que Sylvain Simard a joué un rôle important. Cela est un fait. Ce qui est moins su, par contre, c’est que son chef de cabinet du temps, un certain Daniel Amar (il a été aussi conseiller spécial de Bernard Landry celui-là), aurait joué un rôle beaucoup plus important dans le plan ourdi contre Michaud. M. Amar est issu de la communauté juive sépharade. Il est aujourd’hui impliqué au Congrès juif canadien.
Comme quoi, toute la lumière est loin d’avoir été faite dans ce dossier.
p.s. Pour en savoir davantage sur l’affaire Michaud, il faut lire l’excellent livre de Gaston Deschênes qui vient d’être publié aux Éditions Septentrion.