Le PQ mangera-t-il un autre de ses chefs ?

À l’origine des déboires de la chef péquiste, nous retrouvons plusieurs éléments.  Tout d’abord, les foutus sondages.  Au Québec, là où la culture politique du peuple laisse plus qu’à désirer, on en conviendra tous, les gens choisissent les politiciens à leur tête, sans égard véritables pour les idées qu’ils véhiculent ; cela a donné la vague orange.  Et force est d’admettre qu’une image de grosse bourgeoise déconnectée de la réalité des Québécois colle à la peau de Pauline Marois comme un sparadrap à une plaie purulente.  Il n’y a rien à faire pour remédier à cela.  Conséquence :  Le PQ est plombé par l’image de Marois que perçoivent les gens et se retrouve maintenant dans les bas-fonds des intentions de vote.

Au Québec, la culture politique des politiciens n’est guère plus reluisante que celle du peuple.  Conséquence : les partis carburent essentiellement aux résultats des sondages – et à ce qui se dit dans les médias –  pour agir ou ne pas agir.  Le PQ à 17 ou 19 % des intentions de vote ne pouvait que provoquer un vent de panique au sein du parti de la gouvernance souverainiste.  Et c’est ce qui se produit présentement. Pauline Marois en fait les frais. Elle payera même le gros prix, c’est écrit dans le ciel.

Il y a des années de cela maintenant, j’avais clairement dit – et j’étais le seul à m’être dressé publiquement face à Pauline Marois – que cette dame, malgré ses qualités indéniables, ne ferait pas un bon chef du PQ.  Pourquoi ?  À cause de son bilan souverainiste.  À l’époque, je percevais clairement que la priorité de Mme Marois ne serait pas le pays.  Et considérant la ridicule gouvernance souverainiste qu’on a depuis mise de l’avant, on admettra que je ne m’étais point trompé.  Or, aucun chef du PQ, en fait aucun chef de parti, ne parviendra jamais à demeurer en selle s’il ne mène pas les combats fondamentaux de sa formation. Ça prend vraiment pas la tête à Papineau pour comprendre ça.

À mes yeux, le PQ n’est donc pas un parti-bouffe-chefs sans cœur.  C’est seulement un parti qui finit toujours par se débarrasser des chefs tièdes eu égard au combat indépendantiste qui le dirigent, chefs que les militants ont choisi en contemplant les sondages.  Alors, attention avec Duceppe-le-sauveur qui cartonne en termes de popularité…

Loi 33 et placement syndical

Je l’admets d’emblée. Du fin fond de la forêt où je suis depuis plusieurs jours, je n’ai pas eu la possibilité d’étudier en profondeur le projet de loi du gouvernement qui mettra fin au placement syndical.  Mais je me permets tout de même d’y aller de quelques réflexions qui me traversent l’esprit ces jours-ci.  On saura bien assez tôt si mes craintes sont fondées ou non.

Tout d’abord, il m’apparaît clairement que l’objectif du gouvernement Charest en frappant les grandes centrales syndicales avec le projet de loi 33, principalement la FTQ, est de détourner l’attention publique.  Charest devait savoir pertinemment que cette loi ferait ruer la FTQ dans les brancards, ce qui ne manqua pas de survenir :  des chantiers ont été bloqués, des travailleurs intimidés.  Dans tout ce remue-ménage, le syndicalisme en a pris pour son rhume, ce qui ne peut que faire l’affaire du Parti libéral, ce parti du patronat, c’est clair.  Mais ce scénario permet en plus de faire un peu oublier les grands magouilleurs politiques et des firmes d’ingénierie et la pseudo commission d’enquête sur la corruption dans la construction.  Ce qui semble maintenant le plus grave sur les chantiers, ce ne sont plus les pots-de-vin, les traitements de faveur et autres.  Ce sont désormais les agissements des Rambo Gauthier de ce monde.

On va s’entendre sur une chose.   Les cas d’intimidation, aussi déplorables soient-ils, ne sont rien en comparaison des milliards que les amis du PLQ volent au peuple québécois depuis des années.  Les priorités à la bonne place, svp !

La loi 33 est également un instrument permettant aux libéraux de diviser pour mieux régner.  À ce jour, c’est la FTQ qui contrôlait le placement syndical sur les chantiers.  La loi 33 mettra un terme à cela.  La CSN ne s’en plaint aucunement, elle qui espère profiter de la nouvelle situation et accroître par le fait même son pouvoir.

À une certaine époque, Michel Chartrand déplorait le maraudage syndical et le fait que les syndicats se tiraillaient entre eux bien plus qu’avec le patronat.  Chartrand était clairement un partisan du syndicalisme de combat, du vrai combat, celui tourné contre les exploiteurs de tous poils. Aujourd’hui, à ce qu’on voit, les choses n’ont guère changé.  Les syndiqués se divisent pour mieux ramasser les miettes qui tombent de la table des maîtres pendant que le patronat demeure, quant à lui, beaucoup plus uni.  Un combat à forces inégales ?  Bien sûr.  Mais grâce aux manœuvres des grands bonzes de ce monde, le peuple ne voit guère cela, il critique de ce fait bien plus les syndicats que les bons patrons « qui donnent de l’ouvrage ».  Tant qu’il en sera ainsi, l’exploitation pourra perdurer.

Les libéraux et leurs alliés ne peuvent qu’apprécier tout affaiblissement du syndicalisme.  Ce dernier, historiquement, a constitué l’une des forces vives du Québec français.  En 1995, par exemple, les grandes centrales étaient partie prenant du camp du Oui.  Le patronat, lui, du côté du Non.  En affaiblissant les syndicats, c’est le Québec français que frappe également Charest.  Après avoir miné les programmes de francisation des immigrants, après avoir intégré l’enseignement de l’anglais en première année, après avoir haussé les seuils d’immigration, rendant encore plus difficile l’intégration de ceux-ci au Québec français, voilà que Charest s’en prend violemment aux syndicats.  C’était prévisible.  Il n’y a que le PQ qui ne semble pas voir – encore une fois – plus loin que le bout de son nez.

Simultanément, Charest fait un beau cadeau à la grande entreprise avec la loi 33.  Les syndicats ne feront plus la pluie et le beau temps lorsque viendra le temps de choisir la main-d’œuvre qui donnera vie aux chantiers.  En clair, cela signifie que les compagnies pourront se tourner vers des travailleurs plus faibles parce que moins bien protégés.  Est-ce le retour du cheap labour auquel nous assisterons sur les chantiers ?  Qui vivra verra.

Pour se donner une idée de ce que cela pourrait avoir l’air, il s’agit de se tourner vers l’Alberta.  Là-bas, une proportion importante des travailleurs de chantiers ne sont pas syndiqués.  Afin de répondre à la demande d’une main-d’œuvre toujours meilleur marché, les compagnies importent des travailleurs du tiers-monde ;  des Philippines, entre autres.

Au Québec, où le gouvernement rêve de vendre le plan Nord à la planète entière et aux Chinois et aux Indiens principalement, peut-on penser que l’élimination du placement syndical permettra aux entrepreneurs de ces pays d’engager de la main-d’œuvre qu’ils connaissent si bien, c’est-à-dire celle qui se vend pour une bouchée de pain, phénomène que les syndicats ont historiquement combattu ?  Peut-être.  Qui vivra verra disais-je plus haut.  Je le répète donc ici une fois encore.

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