Pour en revenir aux suites du gala de l’ADISQ, il faut que je vous dise: ce qui me choque, moi, ce ne sont pas les gentilles provocations savamment étudiées d’untel, ni le franglais adolescent de telle autre (quoique…), ni le sempiternel clivage entre les quétaines et les snobs, ni la proverbiale chicane entre vieux un peu aigris et jeunes qui se prennent un peu pour le boutte de toutte.
Non. Ce qui me donne envie, moi, de, je ne sais pas, défoncer un meuble à la hache ou garrocher la tv par la fenêtre, c’est une infamie récurrente qui caractérise, encore aujourd’hui, bon nombre de grosses productions télévisuelles québécoises à caractère plus ou moins musical, comme par exemple le spectacle de la Fête nationale ou, justement, le gala susmentionné. Cette infamie, cette abomination, cette calamité, porte un nom: pot-pourri! Ah, non, encore des pots-pourris! Au secours!
Mais quand cessera-t-on cet affront fait à la musique au nom du besoin aussi irrépressible que mal canalisé de faire de la tv qui en met plein la vue, parce que « sinon, le monde vont changer de poste! »?
L’ADISQ, cette année, a atteint un sommet, de mémoire, jamais vu, avec un numéro de pot-pourrissime digne du livre des records. Ce n’était plus les chansons qu’on y saucissonnait dans l’habituelle suite exaspérante de débuts de plaisir interrompus, mais les bouts de chansons, voire les bouts de refrains ou de couplets, pour n’en conserver parfois qu’un ou deux mots. Du délire. Ainsi, dans un moment culminant mémorable, la pauvre Je ne suis qu’une chanson est devenue un simple: « mais moi » sans suite, perdu entre deux autres restants de chansons défeintisées pour la cause. Tout ça pour que la prod puisse dire: « Heille, on leu’z’a joué vingt-huit tounes en deux minutes! C’est-tu pas beau, ça?! ».
Gens de télé, de grâce, faites un peu confiance aux gens de musique. Laissez-les s’exprimer, donnez-leur juste un peu d’espace. Ils vous le rendront au centuple, et nos cœurs et nos oreilles vous en remercieront encore davantage. Le Québec est rempli à ras-bord de belle et de merveilleuse musique. Comme le chantait un célèbre troubadour: on devrait peut-être l’écouter!