Appuyons le peuple vénézuélien contre l’impérialisme étasunien et ses alliés, dont le Canada, malgré son régime failli

L’implosion catastrophique et tragique du régime bolivarien démontre la contradiction flagrante entre sa politique d’insertion extractiviste, essentiellement pétrolière, dans le marché mondial et celle extérieure d’anti-étasunienne, et non anti-impérialiste étant donné son alliance avec la Chine et la Russie, ni antilibérale étant donné la prospérité et le renforcement du capital financier vénézuélien sous Chavez. Tant que cette insertion a été payante grâce à la cherté du pétrole, elle a permis au régime de se construire une importante base d’adhésion interne et externe grâce à une politique de redistribution d’une significative part de la rente pétrolière ce qui n’a pas empêché qu’il en restait suffisamment pour soutenir une “boli-bourgeoisie” corrompue liée à une partie de la bourgeoisie traditionnelle et pour susciter une importante criminalité endémique. Ajoutée à l’encadrement de la population à la cubaine dans un parti verticaliste, cette redistribution idéologiquement et politiquement a désarmé le peuple vénézuélien, lui qui avait sauvé le régime naissant d’un coup d’État par la fraction pro-étasunienne de la bourgeoisie et d’une grève réactionnaire, quand “la bise fut venue” portée par une plongée du prix du pétrole politiquement voulue par les ÉU contre ses ennemis russe, iranien et vénézuélien. Si les acquis de cette redistribution ont permis le bon fonctionnement de la démocratie parlementaire sous Chavez, ce n’est plus le cas aujourd’hui où elle est devenue manipulatoire et anti-constitutionnelle.

Le Venezuela mériterait-il donc un coup d’État pour sauver son peuple de la faim et de la dictature ? Combien de pays faudrait-il aligner où les gens ont systématiquement faim et où les régimes sont autoritaires desquels ils fuiraient en masse si les pays voisins pouvaient et daignaient les accueillir convenablement que ce soit pour des raisons humanitaires ou politiques ? La Colombie et le Brésil, avec leurs gouvernements pro-étasuniens de droite dure récemment élus, loin d’ériger un mur à la Obama/Trump ou même d’hypocritement renvoyer la majorité des personnes réfugiées dite clandestines à la Trudeau, ouvrent leurs portes toutes grandes et acceptent de servir de bases d’appui à un interventionnisme dit humanitaire qui succède à celui dit civilisationnel d’il y a plus d’un siècle. Pendant ce temps, le gouvernement étasunien, depuis la présidence Obama, multiplie les sanctions contre le régime Maduro dont la levée pourrait lui donner les moyens d’importer nourriture et médicaments en masse[1]. Il y a quelque naïveté à ne pas voir l’éléphant dans la pièce soit la volonté de la bourgeoisie étasunienne de reprendre le contrôle de sa dite “cour arrière”, en particulier de la manne pétrolière du Venezuela, la plus importante au monde, plus que celle de l’Arabie saoudite devenu un allié moins fiable et plus fragile, malgré qu’une bonne portion soit du pétrole sale mais qu’importe à l’impérialisme étasunien et consorts. Guette dorénavant le spectre de l’intervention militaire dont les précédents afghan, irakien et libyen font voir la portée dévastatrice… ce qui retient les alliés étasuniens et, sans doute, fait hésiter l’armée étasunienne. Mais c’est la fraction la plus réactionnaire de la bourgeoisie étasunienne qui décidera en dernier lieu, en connivence avec leurs pendants vénézuéliens qui n’en sont pas à un coup d’État près.

On ne peut que dénoncer à cor et à cri cette intervention et son éminent danger de guerre qui s’ajoute à la montée rapide des tensions entre l’Inde et le Pakistan, deux puissances nucléaires qui en sont rendus aux bombardements aériens réciproques. Au-delà de l’appel à « une solution pacifique, démocratique et négociée » de Québec solidaire, des manifestations anti-interventionniste et anti-guerre seraient de mise à l’initiative de la gauche altermondialiste et politique faute de laisser l’initiative aux néo-staliniens pro-Maduro. Quant au régime Maduro, « [f]ace aux sanctions économiques prises par Washington et vu la crise humanitaire en cours au Venezuela, il serait tout à fait justifié que les autorités suspendent le remboursement de la dette afin de consacrer les sommes de devises ainsi épargnées à l’achat de médicaments et de nourriture. » (CADTM).

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1. Justin Akers Chacón, The empire behind the coup, SocialistWorker.org, 26/02/19 : Les paragraphes « Making Venezuela’s economy scream » et « The Trump offensive » donnent la liste de ces sanctions et leurs contextes.

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